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Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances
Promotion 2012
Thèse Professionnelle
en Intelligence Economique et Management des Connaissances
Présentée par
Rodolphe Delabarre
« Les déterminants endogènes et
exogènes de la mise en place d’une
entité Intelligence Economique au
sein d’une organisation »
Thèse dirigée par M. Olivier Pommeret,
Professeur Affilié – SKEMA
Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012
Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School
Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 2
SKEMA BUSINESS SCHOOL
RESUME
« Déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une entité Intelligence
Economique au sein d’une organisation »
par Rodolphe Delabarre
Directeur de thèse professionnelle: Olivier Pommeret
La présente thèse professionnelle traite des déterminants endogènes et exogènes de
la mise en place d’un processus d’Intelligence Economique (IE) au sein d’une
organisation.
Ces déterminants sont au nombre de quatre : 1) le type d’organisation (sur la base de
la typologie de Mintzberg) de l’entreprise considérée impactant les flux d’informations,
2) la cartographie des processus et la façon dont le processus IE s’y intègre, 3) la
culture d’entreprise favorisant ou non un partage des connaissances, et enfin 4) la
pression de la concurrence, comme déterminant exogène.
Ce travail de recherche se propose donc d’offrir un complément aux écrits sur l’IE en
appréhendant la problématique des conditions de déploiement au sein des
entreprises, adressant les questions, qui nous semblent orphelines, du ‘’quand ‘’ et du
‘’comment’’ relatifs à une mise en place d’un dispositif IE.
L’approche théorique sera accompagnée d’un volet pratique traitant du déploiement
d’un processus d’IE au sein de l’entreprise Renault. Pour ce faire, seront étudiés les
quatre déterminants. Leur mise en perspective conduira à une préconisation et mise
en application du système le plus adéquat : une organisation IE maillée, notamment
avec la Direction du Management des Risques pour partager une finalité ; c’est à dire
la réduction des risques via une maîtrise de l’information stratégique
(A. Guilhon/Groupe de travail du Haut Responsable à l’Intelligence Economique).
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Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 3
TABLE DES MATIERES
REMERCIEMENTS------------------------------------------------------------------------------------p.4
INTRODUCTION GENERALE--------------------------------------------------------------------p.5
PARTIE I : MISE EN PLACE ET FINALITE
D’UNE INTELLIGENCE ECONOMIQUE AU SEIN DE l’ENTREPRISE :
UN ETAT DE L’ART--------------------------------------------------------------------------------p.10
Chapitre 1 : Intelligence Economique : présentation générale, définitions-----------p.11
Chapitre 2 : Analyse critique de l’approche systémique
de l’Intelligence Economique---------------------------------------------------------------------p.19
Chapitre 3 : Vers une analyse organisationnelle--------------------------------------------p.24
PARTIE II : CADRE DE LA RECHERCHE---------------------------------------------------p.29
Chapitre 4 : Analyse théorique des déterminants d’une mise en place
et de la finalité de l’Intelligence Economique en entreprise------------------------------p.30
Chapitre 5 : Mode opératoire du modèle------------------------------------------------------p.40
PARTIE III : MANAGEMENT DE L’INTELLIGENCE ECONOMIQUE
AU SEIN DE L’ENTREPRISE RENAULT----------------------------------------------------
Chapitre 6 : Organisation, Processus, Culture d’Entreprise
et Environnement de Renault-------------------------------------------------------------------
Chapitre 7 : Application du modèle d’Intelligence Economique------------------------
CONCLUSION--------------------------------------------------------------------------------------p.49
Bibliographie-----------------------------------------------------------------------------------------p.51
Liste des figures------------------------------------------------------------------------------------p.54
Liste des illustrations------------------------------------------------------------------------------p.56
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REMERCIEMENTS
L’auteur souhaite exprimer sa reconnaissance au Directeur Général Adjoint Plan-
Produit-Programmes et au Directeur de la Stratégie et Plan Groupe de RENAULT
pour lui avoir fait confiance et lui avoir permis de mettre en œuvre son projet IE, dont
l’inscription au Mastère Spécialisé en Intelligence Economique et Management des
Connaissances faisait partie.
Il tient également à remercier l’ensemble du corps professoral du Mastère Spécialisé
Intelligence Economique et Management des Connaissances de SKEMA BUSINESS
SCHOOL.
Enfin, l’auteur adresse un salut particulier à sa famille pour son soutien de tous les
instants.
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INTRODUCTION GENERALE
Que sais-je de l’Intelligence Economique ? C’est de cette interrogation qu’est née
une investigation des différentes définitions qui en ont été faites et une réflexion sur
les déterminants d’une mise en place optimale d’une entité Intelligence Economique
au sein d’une entreprise.
Comment définir l'Intelligence Economique (IE) : une science; une discipline; une
boîte à outils? Pourquoi ne pas l’appréhender comme une méthode? Méthode, un
mot apparemment anodin, qui pourtant délivrerait tout son fondement et son sens à
l'IE, car selon Descartes « on ne peut se passer d'une méthode pour se mettre en
quête de la vérité des choses ». Une méthode donc pour recueillir, traiter, analyser,
synthétiser l'information et enfin recommander, préconiser un plan d'actions à partir
de la connaissance acquise.
Alors qu'est-ce qu'est vraiment l'IE? Serait-ce une science?
A l'instar de « L'économie [qui] est la science qui étudie comment des ressources
rares sont employées pour la satisfaction des besoins des hommes vivant en
société » (E. Malinvaud, dans « Leçons de théorie microéconomique »), selon Hervé
Basset (Site web « Intelligence Scientifique et Veille » intelligencescientifique.wordpress.com) ,
l'IE ou Intelligence Scientifique se définirait « comme l’ensemble des actions
coordonnées d’acquisition, d’analyse, de conservation et de diffusion de l’information
de nature scientifique en vue de son exploitation par les acteurs de l’institution ».
Pour autant cela n'en fait pas une science, car l'Intelligence Economique n'est pas :
« [cet] ensemble cohérent de connaissances relatives à certaines catégories de faits,
d'objets ou de phénomènes obéissant à des lois et/ou vérifiés par les méthodes
expérimentales » (Larousse). La référence scientifique serait plus liée à « la science
de l’information [qui] a pour objet la compréhension d’un processus d’échange
relevant de la préoccupation de la récupération de l’information quelle qu'elle soit »
(L. Fillipozzi à propos de « Science de l’Information : de la discipline à
l’enseignement », J. Deschamps).
Serait-ce une discipline, au sens « [d'] une branche du savoir développée par une
communauté de spécialistes adhérant aux mêmes pratiques de recherche »
(Wikipedia, fr.wikipedia.org/wiki/Discipline) ?
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Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 6
En fait, la branche du savoir concernée ici serait celle du Système d'Information (ou
SI) : « [cet] ensemble organisé de ressources (matériel, logiciel, personnel, données,
procédures…) permettant d'acquérir, de stocker, de communiquer des informations
sous forme de données, textes, images, sons… dans des organisations pour
répondre aux besoins en information de ses utilisateurs ». Ainsi, le processus
d'Intelligence Economique de l'entreprise s'inscrirait dans ce Système d'Information.
Serait-ce une boite à outils? On pense au récent ouvrage de Ch. Deschamps et
N. Moinet, « La boîte à outils de l'Intelligence Economique »1
qui délivre cinquante
neuf outils. Pour autant ces outils sont organisés selon les six dimensions de l'IE:
« Intégrer et orienter une démarche d'intelligence économique, Surveiller son
environnement pertinent, Traiter et analyser l'information stratégique, Manager
l'information et la connaissance, Protéger son patrimoine immatériel, Influencer son
environnement », sous-tendant qu'au-delà d'une simple boîte à outils, il y a bien
évidemment une finalité; ce qu'O. Soula désigne « comme la manière d'utiliser
l'information et la communication pour rendre une entreprise plus performante est
essentielle à la vie des entreprises dans un monde économique qui s'annonce de
plus en plus incertain » dans le billet blog intitulé « Qu'est-ce que l'intelligence
économique ? » (20 novembre 2011, www.pensee-action.com). Une manière donc, et
même une méthode.
Alors l'IE, une méthode structurante pour aider les entreprises à maîtriser leur
environnement et prendre des décisions stratégiques? Il y aurait donc une analogie
avec « Le discours de la méthode » de Descartes, sous-titré « Pour bien conduire sa
raison, et chercher la vérité dans les sciences », posant le postulat que l'homme peut
accéder à la connaissance universelle par la raison. Il s'agit de :
1/ne recevoir aucune chose pour vraie tant que son esprit ne l'aura clairement et
distinctement assimilé préalablement;
2/diviser chacune des difficultés afin de mieux les examiner et les résoudre;
3/établir un ordre de pensées, en commençant par les objets les plus simples
jusqu'aux plus complexes et divers, et ainsi de les retenir toutes et en ordre;
4/passer toutes les choses en revue afin de ne rien omettre.
Quatre règles donc (règle d'évidence, règle d'analyse, règle de synthèse, règle des
1
Ch. Deschamps et N. Moinet, La boîte à outils de l'Intelligence Economique. Dunod, 2011.
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dénombrements entiers) qui s'appliquent aisément à l'information stratégique qu'une
entreprise doit maîtriser pour survivre et/ou prospérer. En définitive, ne détient-on
pas un nouveau discours de la méthode à appliquer à l'entreprise, posant comme
postulat que l'entreprise peut accéder à la connaissance par l'IE ? Une alchimie, en
quelque sorte, entre une méthode et de l'intuition/de l'instinct, qui fera du veilleur ou
de l'analyste IE une personne clé au sein de l'entreprise.
Mais au-delà du ‘’quoi’’, et du ‘’qui’’, tel le réseau d’acteurs impliqués au sein de
l’entreprise, se posent les questions du ‘’comment’’ et du ‘’quand’’ il est optimal de
mettre en place un système d’IE au sein d’une entreprise. On ne peut occulter les
ressorts; les déterminants de la mise en place et du déploiement de l'IE au sein d'une
entreprise, et comment arriver à un maillage de ces différentes activités IE.
En effet, nous revisiterons les différentes définitions de l'Intelligence Economique,
telles que celle du rapport Martre ou encore celle de l'association des professionnels
de l'information et de la documentation (ADBS) pour faire le constat que ne sont pas
abordées les questions du contexte préalable nécessaire à la mise en place de ces
actions et ensuite de leur coordination.
De plus, dans les termes employés par G. Colletis (de l'Association Française pour le
Développement de l'Intelligence Economique, AFDIE), la notion de compétence
émerge : compétence organisationnelle ? Cette compétence ne serait-elle pas
inscrite dans ce que Ch. Laure et P. Jouxtel nomment l'ADN de l'entreprise dans
l'article Le Cercle Les Echos du 05/06/2012, ADN : la clé cachée de la réussite
stratégique? Ce que nous nommerons aussi sa culture organisationnelle.
Toute entreprise ne serait ainsi pas apte à mettre en place et à déployer un système
efficace d'Intelligence Economique. Ne faudrait-il pas au préalable qu'elle ait une
culture adéquate, une organisation idoine? Nous entendons par culture « [ce qui]
caractérise l'entreprise et la distingue des autres, dans son apparence et, surtout,
dans ses façons de réagir aux situations courantes de la vie de l'entreprise comme
traiter avec un marché, définir son standard d'efficacité ou traiter des problèmes de
personnel 2
». Ceci fait référence à la vision du consultant en Intelligence
Economique exprimée par J. Bondu, le comparant à un médecin: « Le système
immunitaire du malade existe mais il est déficient, le médecin vient seulement le
2
M. Thevenet, La culture d'entreprise. PUF, 2010.
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renforcer. De même, après avoir établi son diagnostic, le consultant en IE vient
revivifier la gestion des informations dans l’entreprise, en optimisant sa collecte, son
traitement, et sa diffusion. Il n’y a pas de remède miracle. Il faut bien comprendre de
quoi souffre l’entreprise pour apporter la bonne solution ».
Pour autant, la cause racine pourrait être plus profonde, c'est à dire être liée à l'ADN
même de l'entreprise; ADN qui serait incompatible avec la mise en place d'un
système IE. Par incompatibilité, il faut comprendre une culture d'entreprise et/ou une
organisation ne privilégiant pas la communication et le partage entre les acteurs, ou
encore ne motivant pas les collaborateurs pour obtenir les consensus
nécessaires... En effet la culture d'entreprise « entraîne aussi certains côtés négatifs,
certaines limites, si elle n'est pas suffisamment prise en compte. C'est le cas d'une
culture d'entreprise trop forte, qui peut mener les membres de l'organisation à une
myopie envers le marché. Une "culture du succès" pourrait ainsi inhiber certains
réflexes de survie et entraîner l'entreprise dans des projets dangereux pour son
avenir » (Wikipedia, fr.wikipedia.org/wiki/Culture_d'entreprise).
En définitive, il faudrait, avant toute chose, comprendre l'organisation sous les
différents angles définis par M. Thevenet : « l'ensemble des valeurs partagées, rites,
mythes, symboles et [son] histoire » dans le cadre d'une mise en place ou d'un audit
d'une IE. Et de conclure que le déploiement d'une Intelligence Economique au sein
d'une entreprise ne pourra pas se décréter, et ne pourra pas être ‘’du clés en main’’.
Notre travail vise donc à mettre en lumière les éléments déterminants dans la mise
en place d’un dispositif IE au sein d’une entreprise, éléments qui relèvent plus des
sciences ‘’molles ‘’ que des sciences ‘’dures’’, car liés à l’humain : type d’organisation
de l’entreprise considérée, type de procédures, type de culture d’entreprise, intensité
de la concurrence à laquelle l’entreprise est confrontée ; autant de facteurs clés qui
ne sont, par exemple, pas mesurés dans l’audit d’une IE (test 1000) proposé par
B. Besson3
. C’est donc cette carence que nous nous proposons de combler : avant
de faire l’audit de l’IE dans une entreprise, il s’agit de faire un diagnostic du contexte
(facteurs endogènes et exogènes) dans lequel l’entreprise agit.
Ainsi, en guise d’hypothèses de recherche, nous postulons qu’avant toute
implantation d’une IE dans une entreprise, il s’agit de faire un diagnostic
3
Académie de l’Intelligence Economique, Le « Test 1000 » ©. http://www.veille.ma/IMG/pdf/test-1000-
intelligence-economique-entreprise.pdf
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environnement/type d’organisation/cartographie des processus/culture d’entreprise. Il
y aurait des conditions préalables qui doivent être créées afin que le milieu soit
propice. Ensuite, une fois définies ces conditions, ce que nous appellerons ‘’le
quand’’, nous nous attellerons au ‘’comment’’ ; à savoir l’alternative entre une entité
IE intégrée/centralisée ou une entité IE maillée/décentralisée.
La méthodologie que nous utiliserons sera double. Dans un premier temps, nous
réutiliserons la thèse professionnelle de J. Bondu4
dont l’objectif était de réaliser un
benchmarking des approches IE des différentes grandes entreprises françaises.
Nous poursuivrons donc ce travail en offrant un éclairage complémentaire : tenter
d’expliquer le type d’IE mis en œuvre dans telle ou telle entreprise via une mise en
perspective des quatre déterminants clés : Type d’organisation/Type de
procédures/Type de culture d’entreprise/Intensité concurrentielle. Nous apporterons
donc un volet explicatif à l’approche de J. Bondu. Ensuite, nous validerons nos
hypothèses dans le cadre du déploiement d’une organisation IE au sein de
l’entreprise Renault. Nous établirons donc un diagnostic des quatre déterminants
pour cette entreprise et justifierons le type d’IE mis en œuvre (maillée vs
centralisée) ainsi que son modus operandi. Il s’agira d’une expérience in vivo,
puisque le fruit de dix huit mois d’activité comme directeur Intelligence Economique
et Benchmarking au sein de l’entreprise Renault.
Notre travail nous semble utile à double titre. D’un point de vue théorique, il complète
les définitions faites de l’intelligence Economique en ce sens que nul n’a mis en
lumière les conditions nécessaires à la mise en place d’une IE. De plus, notre travail
est d’utilité première pour Renault, car il définit les conditions de mise en place d’une
IE au sein de l’entreprise, avec notamment un maillage clé entre IE et Management
des Risques ; deux directions qui ne se parlaient pas auparavant et qui travaillent
désormais main dans la main, avec pour finalité d’alerter sur les risques stratégiques
et de proposer des contremesures à la Direction Générale.
Ce maillage IE/Management des Risques est de notre point de vue la concrétisation
opérationnelle de la définition de l’IE comme « le processus de maîtrise de
l’information stratégique ayant pour finalité la réduction des risques » (A. Guilhon
Groupe de travail du Haut Responsable à l'Intelligence Economique).
4
J. Bondu, Benchmarking des pratiques d’intelligence économique. Thèse professionnelle, 2001.
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PARTIE I : MISE EN PLACE ET FINALITE D’UNE
INTELLIGENCE ECONOMIQUE AU SEIN D’UNE
ENTREPRISE : UN ETAT DE L’ART
Chapitre 1 : Intelligence Economique : présentation générale, définitions
Chapitre 2 : Analyse critique de l’approche systémique de l’IE
Chapitre 3 : Vers une analyse organisationnelle
« La connaissance s'acquiert par l'expérience, tout le reste n'est que de
l'information ».
Albert Einstein
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Chapitre 1 : Intelligence Economique
________________________________________
1. Présentation générale - Concepts et Histoire
2. Définitions
3. Approche systémique
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1. Présentation générale – Concepts et Histoire
Qu’est-ce que l’Intelligence Economique ? Question qui peut sembler anodine, mais
qui finalement prend tout son sens, lorsque l’on constate qu’il y a presque autant de
définitions de l’IE que de définisseurs.
Ainsi, Stéphane Goria dans une analyse de la proximité entre Knowledge
Management et Intelligence Economique fait le constat que ces deux domaines
souffrent « de ne pas disposer à l’heure actuelle de définition consensuelle pour les
qualifier ».5
Cet auteur opère une démarche historique et présente les différentes phases
constitutives et fondatrices de l’IE.
Phase 1 : L’IE comme système de veille (fin des années 50 jusqu’au début des
années 80).
Figure 1.1 Cycle du renseignement. Source www.manager.com © Image
L’IE d’origine américaine est donc ici associée à la Business Intelligence (1958) et
bientôt la Competitive Intelligence (1959) que M. Porter6
va développer dans les
années 80 au travers de l’analyse des cinq forces de la concurrence et qui
constituera un point de départ de la phase 2.
5
S. Goria, knowledge Management et Intelligence Economique deux notions aux Passés proches et aux futurs
complémentaires, http://stephane.goria.free.fr/#_Stéphane_GORIA
6
M. Porter, How Competitive Forces Shape Strategy, Harvard business Review, March/April 1979.
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Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 13
Phase 2 : la veille stratégique (années 80).
L’action d’intelligence stratégique au sens de la norme AFNOR (Agence Française
de NORmalisation) FD X 50-0527
est l’ « engagement d'un ensemble de démarches
hiérarchisées et ordonnées permettant d'aboutir à la formulation d'analyses à haute
valeur décisionnelle en vue de la prise de décision par la direction ».
Figure 1.2 Management de l’intelligence économique. Source Norme AFNOR FD X 50-052
Phase 3 : l’école française de l’IE (années 1990).
Ce sont donc dans les années 90, que le concept d’IE apparaît, promu par l’école
française. S. Goria relate donc qu’en 1992,
l’expression "intelligence économique" est utilisée pour la première fois par
C. Harbulot8
faisant référence à « toutes les opérations de surveillance de
7
AFNOR Norme FD X 50-052, Management de l'intelligence stratégique, 2011.
8
Ch. Harbulot, La machine de guerre économique, Editions Economica, 1992.
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l’environnement concurrentiel : veille, protection, manipulation de l’information
(leurre, contre-information, …), influence ».
C’est donc une définition dite ‘’englobante’’, pour reprendre l’idée de S. Goria. Mais à
trop englober n’a-t-on pas mélangé les problématiques liées aux Etats et celles liées
aux entreprises menant à un concept polymorphique et donc non spécifique ? Il y a
certes des points de convergence entre Etats et Entreprises, mais cette non-
spécificité n’occulte-t-elle pas les conditions de mise en place d’une démarche IE au
sein d’une entreprise ? La définition de l’IE reste à un niveau macro, c'est-à-dire
partant du tout pour expliquer les parties (versus micro qui elle s’intéresse aux unités
de base telles que l’entreprise, prenant en compte son contexte pour expliquer son
attitude).Ou dit autrement, le caractère trop transversal de l’IE (Etats-Entreprises,
mais aussi au sein d’une entreprise ayant à voir avec la stratégie, le marketing, la
finance, la technologie…) ne la dessert-il pas?
2. Définitions : de la Veille à l’IE
Revisitons donc les différentes définitions afin d’appréhender si certaines abordent le
niveau ‘’micro’’.
Commençons donc par la veille. Cette dernière d’après l’AFNOR, à travers la norme
expérimentale française XP X 50-0539
, est « l’activité continue et en grande partie
itérative visant à une surveillance active de l’environnement technologique,
commercial, etc. pour en anticiper les évolutions ».
Selon P. Romagni et V. Wild10
, « la veille est une analyse des différentes facettes de
l’environnement afin de développer la proactivité et de préparer au mieux la prise de
décision d’une organisation ».
Ces deux définitions sont à compléter, car comme le souligne T. Bouchakor11
:
« Toutefois, deux conditions sont nécessaires pour mener une fonction de veille
efficacement : une bonne connaissance de la culture de l’entreprise ainsi qu’une
maîtrise suffisante de l’environnement dans lequel le veilleur agit. »
9
AFNOR, Norme XP X 50-053, Prestation de veille et prestation de mise en place d’un système de veille. 1998.
10
P. Romagni, V. Wild, L’intelligence économique au service de la stratégie de l’entreprise. LPM, 1998.
11
T. Bouchakor, Dispositif d’Intelligence Economique pour le secteur de l’Offshoring au Maroc
Stratégie et Mise en œuvre. Thèse professionnelle, 2006.
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De plus, la veille est insuffisante, car « [elle] consiste à observer de façon
systématique, mais passive, l’environnement sous tous ses aspects (économique,
juridique, culturel, social, historique, écologique…). La veille se différencie de
l’intelligence économique en s’interdisant de modifier l’environnement sur lequel elle
exerce une observation continuelle. La veille a un rôle de détection tandis que
l’intelligence économique a une mission de positionnement stratégique de
l’entreprise dans l’environnement qu’elle remplit par une stratégie d’influence et de
coercition des acteurs de cet environnement12
».
Alors que recouvre l’IE ?
Le rapport MARTRE13
, en donne la définition suivante : « L'intelligence économique
peut être définie comme l'ensemble des actions coordonnées de recherche, de
traitement et de distribution, en vue de son exploitation, de l'information utile aux
acteurs économiques. Ces diverses actions sont menées légalement avec toutes les
garanties de protection nécessaires à la préservation du patrimoine de l'entreprise,
dans les meilleures conditions de délais et de coûts. L'information utile est celle dont
ont besoin les différents niveaux de décision de l'entreprise ou de la collectivité, pour
élaborer et mettre en œuvre de façon cohérente la stratégie et les tactiques
nécessaires à l'atteinte des objectifs définis par l'entreprise dans le but d'améliorer sa
position dans son environnement concurrentiel. Ces actions, au sein de l'entreprise,
s'ordonnent autour d'un cycle ininterrompu, générateur d'une vision partagée des
objectifs de l'entreprise. »
Cette définition fondatrice explicite très clairement les finalités de l’IE pour une
entreprise, mais pour autant ne décrit pas la façon dont les actions doivent
s’ordonner.
Tout comme Ph. Baumard, pour qui: « l'intelligence économique n'est plus seulement
un art d'observation mais une pratique offensive et défensive de l'information. Son
objet est de relier entre eux plusieurs domaines pour servir à des objectifs tactiques
12
Ph. Baumard, Stratégie et surveillance des environnements concurrentiels. Masson, 1991.
13
Œuvre collective du Commissariat du Plan, Intelligence économique et stratégie des entreprises. La
Documentation Française, 1994.
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et stratégiques de l'entreprise. Elle est un outil de connexion entre l'action et le savoir
de l'entreprise ».
Même constat s’agissant de la définition de B. Besson et J.C. Possin, pour lesquels
« l'intelligence économique est la maîtrise concertée de l'information et de la
coproduction de connaissances nouvelles. Elle est l'art de détecter les menaces et
les opportunités en coordonnant le recueil, le tri, la mémorisation, la validation,
l'analyse et la diffusion de l'information utile ou stratégique à ceux qui en ont besoin.
Elle impliquera une protection adaptée à tous les stades de son élaboration :
acquisition, traitement, exploitation, et au patrimoine en résultant avec une attention
particulière aux prémisses (...). Pour l'essentiel, l'intelligence économique est un
cycle d'informations dont la finalité est la production de renseignements stratégiques
et tactiques à "haute valeur ajoutée" ».
Cette définition s’attache au ‘’pourquoi’’ et au ‘’quoi’’, mais peu au ‘’comment’’.
Idem pour C. Revelli : « l'intelligence stratégique est un processus de collecte,
traitement et diffusion de l'information qui a pour objet la réduction de la part
d'incertitude dans la prise de toute décision stratégique. Si à cette finalité on ajoute la
volonté de mener des actions d'influence, il convient de parler alors d'intelligence
économique.»
En somme, chacune de ces définitions vient étoffer le champ et les finalités de l’IE,
mais n’explicite pas les conditions de mise en place au sein d’une entreprise.
De son côté, pour l’association des professionnels de l’information et de la
documentation (ADBS), « [l]’intelligence économique est constituée par l'ensemble
des concepts, des outils, des méthodologies et des pratiques permettant de mettre
en relation, de façon pertinente, différentes connaissances et informations dans la
perspective de la maîtrise et du développement de la dynamique économique. Cette
mise en relation implique en particulier : - une mobilisation des hommes ; - un
traitement et une analyse de l'information et de la connaissance orientés vers une
finalité opérationnelle ; - une circulation efficace des informations et des
connaissances au sein des organisations concernées ».
Ici on effleure du doigt, la notion d’humain que nous relierons aux aspects de culture
d’entreprise et de structure des organisations. Faudrait-il que des conditions
préalables à la mise en place d’un dispositif IE soient réunies ?
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Des capacités spécifiques donc, auxquelles G. Colletis, l’un des trois pères
fondateurs de l'Association Française pour le Développement de l'Intelligence
Economique (AFDIE), fait référence, l'IE représentant la « capacité [d'une entreprise]
à combiner efficacement les réseaux et compétences extérieures en vue de résoudre
un problème productif inédit ».
3. Approche systémique de l’IE
L’IE en entreprise est souvent présentée en tant que système. L’approche
systémique au sens de D. Beriot14
« conduit à appréhender de manière globale, et
non analytique, un système et son environnement; utiliser un langage commun pour
travailler entre plusieurs disciplines ou plusieurs métiers; choisir une stratégie
optimale pour agir sur les points sensibles d’un système ».
Figure 1.3 Intelligence Economique et Aide à la Décision. Source F. Jakobiak. Copyright EXISTRAT©.
http://www.finyear.com/Intelligence-economique-et-aide-a-la-decision-BEIC_a74.html
Si nous interprétons le schéma de F. Jakobiak15
, la « finalité » du système serait
donc l’aide à la décision : décisions offensives, défensives et organisationnelles ;
les niveaux d'organisation seraient les observateurs, les capteurs d’informations, le
14
D. Beriot, Manager par l’approche systémique. Editions d’Organisation, 2006.
15
F. Jakobiak, L’intelligence économique, la comprendre, l’implanter, l’utiliser. Editions d’Organisation, 2004.
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groupe d’experts et la Direction Générale ;
et enfin, les échanges entre les parties correspondraient aux flux d’informations.
F. Jakobiak souligne un facteur clé de succès ; à savoir l’implication et le soutien du
Président Directeur Général vis-à-vis de la démarche IE.
Ceci est-il véritablement suffisant ? En effet, l’approche devrait appréhender les
facteurs d'équilibre et de déséquilibre du système IE et pour ce faire, une démarche
analytique doit être entreprise ou encore une approche micro, comme évoquée
précédemment.
L’IE en entreprise ne peut être résumée à un simple processus tel que ci-dessous,
car il nie ou ne tient pas compte du contexte, ce que nous avons appelé des
déterminants endogènes à l’entreprise (type d’organisation, processus, culture
d’entreprise) et un déterminant exogène : l’intensité de la pression concurrentielle à
laquelle l’entreprise en question est exposée.
Figure 1.4 Processus IE. Source Intelligence Economique. Un guide pour débutants
et praticiens. © http://www.madrimasd.org/queesmadrimasd/socios_europeos/
descripcionproyectos/documentos/intelligence-economique-guide-integral.pdf
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Chapitre 2 : Analyse critique de l’approche
systémique de l’IE
________________________________________
1. Un concept d’IE non mature
2. L’épreuve des faits : de premières hypothèses
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1. Un concept d’IE immature
F. Bulinge16
constate que « le concept [d’IE] est encore immature et non validé d’un
point de vue scientifique. Il est en effet confus au plan théorique (définitions floues et
parfois divergentes, confusion fréquente entre la veille et l’IE) et il est intuitif au plan
opérationnel (les actions entreprises dans les diverses régions ne reposent sur
aucune base scientifique) ». Il milite donc en faveur d’une approche systémique.
F. Bulinge reprend ainsi la définition de J. de Rosnay17
pour décrire un système
comme un « ensemble d’éléments en interaction dynamique organisés en fonction
d’un but. ». L’approche systémique de F. Bulinge est complète (versus le système de
F. Jakobiak présenté précédemment) en ce sens qu’elle appréhende trois plans : le
plan individuel, le plan logique, le plan synergique. De ces trois plans et de leurs
interactions vont naître, de notre point de vue, les facteurs d’équilibre et de
déséquilibre du système IE.
Figure 2.1 Approche systémique de l’IE. Source F. Bulinge (ibid.). L’IE d’après le méta-modèle de
Schwartz
18
Selon F. Bulinge, « cette approche théorique permet par exemple d’expliquer en quoi
la diffusion de l’IE s’est avérée inefficiente. En effet, on ne peut envisager une
appropriation durable de méthodes et d’outils (plan individuel), sans prendre en
16
F. Bulinge, L’intelligence économique comme instrument de développement autonome dans les PMO.
Proposition d’un modèle de transfert. http://bulinge.univ-tln.fr/Franck_Bulinge/Articles/IE_PMO.pdf
17
J. de Rosnay, Le macroscope. Le Seuil, 1975.
18
E. Schwartz, A meta model to interpret the emergence, evolution and functioning of viable natural systems,
Cybernetics and Systems. World Scientific. 1994.
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compte les dimensions logiques (dynamique de groupes) et synergiques (état
d’esprit adapté) ». Mais, si les trois plans sont exposés, il n’y a pas pour autant
d’analyse approfondie des tenants et aboutissants : quelles sont les conditions de
réussite ou les risques liés à chaque plan, quels sont les blocages possibles dans le
passage d’un plan à l’autre ? Le cahier des charges d’une mise en place d’une IE au
sein d’une entreprise ou encore l’audit d’une IE déjà existante devrait donc passer
par une analyse détaillée de ces trois niveaux.
Nous pouvons adresser la même critique au modèle de l’Association Française pour
le Développement de l'Intelligence Economique (AFDIE) qui présente onze facteurs
clés liés au management par l’Intelligence Economique. Concernant le leadership,
une des recommandations est de faire partager une culture de l’information. La
problématique est qu’une culture de l’information ne se décrète pas. Donc, avant
d’établir une IE dans une entreprise, il s’agirait de comprendre quels sont les freins
liés notamment au partage de l’information, en décryptant en particulier quelle est la
culture de l’entreprise concernée.
Figures 2.2a et 2.2b Modèle de Management par l’Intelligence Economique Source AFDIE
19
19
J.P. Mousnier, Un modèle de management par l’IE, pour quoi faire ? d’après Benchmark européen de
pratiques en IE, dir. P.Larrat. L’Harmattan, 2008.
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2. L’épreuve des faits : de premières hypothèses
L’analyse de J. Bondu20
opérée lors de sa thèse professionnelle consistant en un
Benchmarking des pratiques d’Intelligence Economique, nous est apparue
intéressante pour tenter de mettre en lumière un lien de cause à effet entre
l’organisation et la culture des entreprises et la façon dont est structurée l’entité
Veille/IE de l’entreprise en question.
J. Bondu, au vu des vingt quatre entreprises faisant partie de son panel, tire deux
constats majeurs.
Le premier est lié à l’organisation et au phénomène de rétention d’information :
« Certaines entreprises ont dit avoir eu des difficultés à coordonner les structures de
veille pour des raisons de rivalités entre les entités de veille. Etre à la tête d'une
structure de veille permet d'être alimenté en information. Or si une coordination se
met en place, il y a un risque de perdre cette prérogative. C'est sans doute en
connaissance de ces difficultés que des entreprises, qui tentent de mettre en place
une coordination, accordent beaucoup d'importance à l'aspect relationnel et humain,
pour ne pas soulever de réticences».
Le second est lié au facteur humain :
« S'il est un point qui fait l’unanimité entre tous mes interlocuteurs, c’est bien la place
du facteur humain dans la veille. Que ce soit au niveau de la détection des besoins,
de la collecte, du traitement ou de la diffusion des informations…, la qualité du travail
effectué est fortement fonction de la qualité humaine des veilleurs ».
De plus, parmi les critères de catégorisation, au-delà de la définition des besoins, de
la collecte des informations, de la diffusion des informations, du traitement des
informations, de l’intégration de la veille au processus de création des produits, était
pris en compte l’aspect centralisée ou décentralisée de la veille. C’est à ce dernier
critère que nous nous sommes intéressés, tentant de trouver un lien entre
organisation de l’entreprise et centralisation ou non de l’entité veille/IE.
20
J. Bondu, (ibid.)
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Ainsi, parmi les vingt quatre entreprises interviewées, onze avaient une entité
veille/IE centralisée versus décentralisée pour treize d’entre-elles. Nous avons tenté
de voir s’il y avait des invariants pour expliquer le pourquoi de la décentralisation.
Nous ne dégageons que quelques hypothèses de travail à ce stade, car le
Benchmarking effectué n’avait pas cette finalité. Il semble ainsi que la structure
matricielle soit un facteur à la décentralisation, de même qu’une culture d’entreprise
orientée tradition orale et/ou fondée sur le réseau. Bien évidemment, ceci n’a pas de
valeur scientifique. Il s’agit d’aller plus loin dans l’investigation.
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Chapitre 3 : Vers une analyse organisationnelle
________________________________________
1. De la théorie à la réalité des entreprises
2. L’organisation comme variable clé
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1. De la théorie à la réalité des entreprises
F. Peguiron21
dans sa thèse de doctorat soutient que « [l’]intelligence économique et
concurrentielle s’appréhende conséquemment comme un prolongement, non comme
un substitut ou un dépassement du management de l’entreprise. L’intelligence
économique implique l’action. Pour cette raison, un tel dispositif ne peut se réduire à
une cellule dite d’intelligence économique : il se doit d’innerver l’organisation entière
et de mobiliser un périmètre d’individus bien plus large que celui des acteurs
spécialisés officiellement impliqués dans l’activité de veille ». De même, citant
H. Wilensky22
, il est affirmé qu’ « [i]l est essentiel alors de conjuguer les techniques
d’intelligence économique avec le pilotage stratégique et les processus
décisionnels ».
Ceci peut être pertinent d’un point de vue théorique. Mais, cela reste du domaine de
‘‘l’incantatoire’’, car c’est nier les réalités diverses des différentes entreprises.
Le principe de réalité impose de mettre la théorie à l’épreuve.
Ce principe de réalité avait été abordé (mais pas développé) par le groupe du
rapport Martre23
. Ainsi, un sous-groupe intitulé "Analyse comparée des systèmes
d'intelligence économique" a mis en exergue des variables « permettant d'expliquer
la présence d'activités d'intelligence économique au sein d'entreprises dans le
monde entier ».
Parmi ces variables, nous trouvons :
-l’exposition aux marchés mondiaux impliquant une contrainte « à une
compréhension globale de leur environnement » ;
-la nouveauté d’un marché ;
-des horizons technologiques longs.
21
F. Peguiron, Application de l'Intelligence Economique dans un Système d’Information Stratégique
universitaire: les apports de la modélisation des acteurs. Thèse de Doctorat Université Nancy 2. 2006.
22
H. Wilenski, Organizational Intelligence : Knowledge and Policy in Government and Industry. Basic Book,
1967.
23
Œuvre collective du Commissariat du Plan, Intelligence économique et stratégie des entreprises.
(Ibid.).
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De même, F. Dufour24
, pour expliquer le processus IE, fait référence à la typologie en
six groupes des modes de traitement de l’information de Ph. Baumard25
.
Cette typologie est fondée sur deux variables : le degré de contrôle de l‘industrie sur
son environnement et le degré de disponibilité de l‘information.
« - Les discrétionnaires : peu d‘informations et environnement historiquement
contrôlé (ex. : les cafetiers – excès de complication du SI par manque d‘informations
utiles à l‘interprétation) ;
- Les monopoleurs : environnement contrôlé et densité de l‘information analysable
(ex. : l‘aéronautique – traitement efficace de l‘information) ;
- Les improvisateurs : environnement historiquement turbulent et peu d‘informations
(ex. : les céréaliers – excès de complication du SI par manque d‘informations utiles à
l‘interprétation) ;
- Les équilibristes : environnement turbulent mais maîtrise des SI pour obtenir une
information synchrone avec les mouvements du marché (ex. : la grande distribution –
traitement efficace de l‘information) ;
- Les metteurs en scène : industrie naissante et peu d‘informations analysables (ex. :
les start-ups – traitement efficace mais en phase de test);
- Les chefs d‘orchestres : industrie naissante mais véritable maîtrise de l‘information
qui leur permet de façonner le développement de leur industrie (ex. : les
prescripteurs, les gourous, les produits dérivés, les softwares – excès de
simplification du SI grâce à la maîtrise de l‘information utile à l‘interprétation) ».
Nous considérons que la variable relative au degré de concurrence est pertinente,
mais elle n’est pas l’unique à prendre en compte.
2. L’organisation comme variable clé
Au-delà des variables explicatives de l’existence d’une IE au sein des entreprises, il
est essentiel de définir les conditions de mise en place d’une IE et de sa réussite.
Dans ce cadre, la compréhension de l’organisation des entreprises est
fondamentale, car une mise en place d’une IE ne se fait pas ex nihilo, elle s’intègre à
une organisation et un management préexistant. Il s’agit donc d’en faire le diagnostic
24
F. Dufour, Approche dynamique de l'intelligence économique en entreprise : apports d'un modèle
psychologique des compétences: contribution à l‘élaboration de programmes d‘actions de la CCI de Rennes.
Thèse de Doctorat, Université européenne de Bretagne, 2010.
25
Ph. Baumard, Organisations déconcertées : la gestion stratégique de la connaissance. Masson, 1996.
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ou, comme stipulé dans « Intelligence économique le guide pour débutants et
praticiens26
», « d’adapter l’intelligence économique aux systèmes
organisationnels. […] En fait, l’Intelligence économique ne peut pas être mise en
place sans engendrer certains changements de procédure et de structure. De
nouveaux rôles, de nouvelles tâches et de nouvelles relations de travail devront donc
être inventés. Chaque personne impliquée par le projet devra avoir une vision claire
de : qui fait quoi, qui doit travailler avec qui… ».
Il faut donc comprendre, comme nous l’introduisions dans le chapitre précédent, le
contexte, l’environnement ou encore ce que pourrions appeler le ‘’liquide amniotique’’
dans lequel le secteur IE va se déployer. Ce liquide va effectivement en conditionner
le développement.
« Le diagnostic organisationnel va donc s’employer à analyser deux grands aspects
de l’entreprise :
• le cadre stratégique (la loi, les aspects politiques et économiques de
l’environnement de travail) et fonctionnel (planification, comparaison des résultats par
rapport aux efforts, distribution des rôles et tâches) ;
• le contexte collectif (climat de l’entreprise, motivation, niveaux variés de
communication, styles de direction, capacité à résoudre les problèmes, organisation
du pouvoir) et individuel (partenariats de pairs à pairs et partenariats entre les
différents niveaux hiérarchiques) ».
Ces aspects vont impacter le mode d’animation de l’IE dans l’entreprise, auquel il
faut ajouter la culture d’entreprise. Ce sont donc des déterminants à la fois exogènes
et endogènes à l’entreprise qui vont structurer la mise en place de l’IE ou, s’ils ne
sont pas pris en compte, vont expliquer son échec.
Figure 3.1a Différents schémas possibles d’implantation de l’IE. Source Intelligence
Economique. Un guide pour débutants et praticiens. ©
26
Partenariat entre les membres du programme CETISME, Intelligence économique. Un guide pour débutants et
praticiens, 2002.
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Figure 3.1b Différents schémas possibles d’implantation de l’IE. Source Intelligence
Economique. Un guide pour débutants et praticiens. ©
Figure 3.1c Différents schémas possibles d’implantation de l’IE. Source Intelligence
Economique. Un guide pour débutants et praticiens. ©
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PARTIE II : CADRE DE LA RECHERCHE
Chapitre 4 : Analyse théorique des déterminants d’une mise en place et
de la finalité de l’Intelligence Economique en entreprise
Chapitre 5 : Présentation de l’approche méthodologique
« Le chercheur doit être libre de tenter des expériences audacieuses, de soutenir
des théories révolutionnaires, voire paradoxales. Il doit disposer du droit à l'erreur ».
Pierre Joliot
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Chapitre 4 : Analyse théorique des
déterminants d’une mise en place et de la
finalité de l’Intelligence Economique en
entreprise
________________________________________
1. Contexte
2. Un déterminant exogène : la pression concurrentielle
3. Trois déterminants endogènes : la culture d’entreprise, le type
d’organisation, le type de structuration par les processus
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1. Contexte
La genèse de notre questionnement est intervenue lors de la lecture des
différents écrits théoriques concernant l’IE ou encore l’ensemble de ses
définitions. En effet, il s’en dégage le constat qu’il n’y a qu’une seule vérité, une
vérité que j’appellerais ‘’pseudo-scientifique’’ : l’existence d’une IE au sein d’une
entreprise est incontournable et son modèle de déploiement serait unique.
Ainsi, prenons l’exemple du guide pratique pour les PME du MEDEF 27
où nous
trouvons dans le thème 2, intitulé « Créer son propre système d’intelligence
économique », l’affirmation marquée : « L’intelligence économique est à la portée
de n’importe quelle entreprise dans n’importe quel secteur d’activité. » Cette
affirmation est des plus péremptoires, car les recommandations pour ce faire
concernent notamment :
-la comptabilisation des dépenses déjà engagées dans les activités qui
s’apparentent à de l’IE ;
-l’évaluation des coûts du savoir et non-savoir ;
-la cartographie des flux informationnels au sein de l’entreprise…
De plus, il faut « nommer un délégué général à l’intelligence économique qui à
temps plein ou partiel organisera, réorganisera et coordonnera les différentes
veilles de l’entreprise en fonction de ses projets ».
L’approche est donc normative à l’instar de l’économie normative qui « fournit
des prescriptions ou recommandations fondées sur des jugements de valeur
personnels » (Wikipedia, fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89conomie_positive_et_normative).
Figure 4.1 l’IE en 4 étapes. Image source Spyworld
nblas.posterous.com/cartographie-de-lintelligence-economique
27
Le Cercle d’Intelligence Economique du MEDEF Paris, L’intelligence économique. Guide pratique pour les
PME. Rapport 2006 du CIE MEDEF.
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N’aurions-nous affaire qu’à un processus simple en quatre étapes : Recherche et
Récupération de l’information, puis Extraction/ Tri, ensuite Analyse et
Exploitation et enfin Restitution et Diffusion? Nous ne le pensons pas.
Il nous semble plus adéquat d’adopter une démarche dite “positive”, qui s’attache
aux explications objectives du fonctionnement d’une IE au sein d’une entreprise.
Si nous continuons notre parallèle avec l’économie, ceci consiste à offrir un socle
pour prévoir comment une démarche d’IE réagira en fonction de déterminants
contextuels et structurels de l’entreprise.
En effet, nous pensons que les définitions et recommandations de déploiement
de l’IE font appel à une « connaissance [qui] ne porterait pas sur le
monde réel, mais sur un monde idéal, où les objets sont parfaits – le monde des
Idées ».28
Nous préférons résolument une approche réaliste prônée par Aristote
(versus l’approche idéaliste de Platon).
F. Bulinge29
réalise l’arbre généalogique de l’IE afin de montrer les sources
nombreuses du concept. Nous en retenons qui ont un statut spécifique, non pas
seulement en tant qu’origines mais en tant que variables d’impact dans la façon
dont une IE peut se déployer : le type d’organisation/le type de structuration par
les processus/la culture d’entreprise.
Figure 4.2 L’arbre généalogique de l’IE. Source F. Bulinge ©
28
H. Hagège, La démarche scientifique : invariants et spécificités disciplinaires. LIRDEF – Université
MontpellierII – IREM, 2007. http://www.irem.univ-montp2.fr/IMG/pdf/La_demarche_scientifique.pdf
29
F. Bulinge, Pour une culture de l’information dans les PMO, un modèle incrémental d’intelligence économique.
Thèse de doctorat en sciences de l’information et de la communication, 2002.
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C'est en ce sens, qu'A. Poncier30
suggère d'utiliser le modèle 7S © de
Mc Kinsey pour évaluer la performance d'une l'IE; modèle dont la grille d'analyse est
fondée sur sept éléments interdépendants : la structure de l'organisation, sa
stratégie, ses systèmes (processus), les valeurs partagées, les savoir-faire, les
ressources humaines, le style de management ; les quatre derniers
éléments dits soft ou culturels (valeurs partagées, savoir-faire, ressources humaines,
style de management) détermineront toute sa spécificité. Nous retrouvons les
éléments liés à la structure et les systèmes, de même qu’à la culture d’entreprise,
avec un élément complémentaire lié à la stratégie que nous aborderons sous l’angle
de la pression concurrentielle.
Figure 4.3 Source Modèle Mc Kinsey ©
(Wikipedia, en.wikipedia.org/wiki/McKinsey_7S_Framework)
2. Un déterminant exogène : la pression concurrentielle
Selon Alain Juillet, « [l]’intelligence économique est un mode de gouvernance
dont l’objet est la maîtrise de l’information stratégique et qui a pour finalité la
compétitivité et la sécurité de l’économie et des entreprises ». Par essence
même, l’IE est un moyen de se prémunir contre la menace de la concurrence.
Donc, la mise en place d’une IE répond à un besoin de connaître, maîtriser les
30
A. Poncier, Utiliser le modèle 7S de McKinsey en intelligence économique. 2008.
http://poncier.org/blog/?p=376
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différentes forces extérieures qui influent sur l’entreprise et ce pour mieux pouvoir
anticiper et entamer une pro-activité et permettre la prise de décision.
Figure 4.4 Les 5 Forces de la concurrence de M. Porter31
+1.Source image Actinnovation ©
Donc, l’intensité de la concurrence va être un des déterminants du déploiement plus
ou moins efficient de l’IE au sein de l’entreprise. Sans concurrence effective ou sans
concurrence perçue par l’entreprise, certaines des finalités de l’IE telles que listées
par B. Besson32
sont caduques, notamment les deux premières :
« •Accroître la compétitivité en s’adaptant aux règles de la concurrence.
•Accroître la compétitivité en modifiant les règles de la concurrence.
•Détecter les opportunités et écarter les menaces.
•Décider à bon escient, réagir vite. »
3. Trois déterminants endogènes : la culture d’entreprise, le type d’organisation, le
type de structuration par les processus
3.a La culture d’entreprise
B. Besson n’évoque pas véritablement la notion de culture d’entreprise, mais il
aborde néanmoins la nécessité de faire coïncider deux types de culture
antagonistes pour un bon pilotage de l’IE.
31
Porter M., How Competitive Forces Shape Strategy, Harvard business Review, March/April 1979
32
B. Besson, Intelligence économique et organisations. 2ème pôle OCDIE, http://www.intelligence-
economique.gouv.fr/IMG/pdf/ocdie_2.pdf
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Figure 4.5 Le Pilotage du système d’intelligence économique. Source B. Besson (ibid.)
Mais en amont du pilotage de l’IE, la culture d’entreprise va être décisive dans la
possibilité de la mettre en place. Il est question ici de compatibilité.
Mais qu’est-ce que la culture d’entreprise et en quoi peut-elle constituer un frein
à la mise en place d’une IE ?
Selon Ch. Durand, J.F. Fili, A. Hénault, « La culture d’entreprise peut être définie
comme l’ensemble des éléments particuliers qui expliquent les bases du
fonctionnement d’une entité spécifique. Elle est, dans un certain sens, un sous-
produit de la culture nationale et par conséquent un ensemble de valeurs, de
mythes, de rites, de tabous et de signes partagés par la majorité des salariés.
La culture d’entreprise est une variable essentielle pour expliquer le vécu
quotidien et les choix stratégiques réalisés par un groupe social »33
.
Ainsi, Pascal Jouxtel rappelle qu' « avant tout tournant stratégique, il est
important d'identifier quels sont les mythes fondateurs, les codes, les obligations
et les interdits en vigueur dans l'organisation. Cela évite que nombre de
stratégies de rupture ne tournent en longs déchirements ou, pire, en échecs »
(LesEchos 24/04/2012, Pour préparer le changement, essayer l'introspection).
La mise en place d’une IE au sein d’une entreprise peut être assimilée à une
stratégie de rupture, car impliquant une ouverture sur l’extérieur et un
management interne des flux/partages informationnels.
« Lorsque [la culture d’entreprise] sous-tend des relations de pouvoirs
déterminées, et que l’adaptation aux circonstances (économiques, stratégiques,
technologiques…) implique la remise en cause du statut supérieur de certains
groupes, la culture d’une organisation peut constituer un frein sérieux à sa
capacité d’intégrer ces changements »34
(N. Lemaître-Rozencweig).
33
Ch. Durand, J.F. Fili, A. Hénault, Culture d’entreprise.2000. http://culture.entreprise.free.fr/,.
34
N. Lemaître-Rozencweig, Organisations, Stratégies, Décisions. Thèse de Doctorat, 1981.
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Alors la culture d’entreprise représente-elle ce support permettant de tendre vers
« l’entreprise cognitive »35
(B. Guilhon et J.L. Levet) dans laquelle l’IE et le
Management des Connaissances constitueraient les bases de l’intelligence
organisationnelle ?
Figure 4.6a Processus de gestion de la connaissance par l’IE et le KM.
Source F. Blondel, S. Edouard, M. N. El Mabrouki (2006)
Figure 4.6b Processus de gestion de la connaissance par l’IE et le KM.
Source F. Blondel, S. Edouard, M. N. El Mabrouki (2006)
Du coup, une seconde question apparaît : l’organisation elle-même supporte-elle
la mise en place d’une IE ? Ou encore, y a-t-il de la place pour un processus de
la connaissance dès lors que l’entreprise est déjà structurée autour de processus
préexistants?
3.b La structure organisationnelle
L’organisation selon H. Mintzberg36
est « une action collective à la poursuite de
la réalisation d’une mission commune ». Si nous considérons que l’implantation
d’une IE au sein d’une entreprise représente une mission commune, il faut donc
s’intéresser de près aux conditions de cette action collective, c'est-à-dire
s’intéresser au type d’organisation, à sa structure ; à savoir « […] la somme
35
B. Guilhon et J.L. Levet, L’intelligence économique et l’économie de la connaissance : quelques éléments de
réflexion. Economica, 2003.
36
H. Mintzberg, Le management, voyage au centre des organisations. Editions d’Organisation, 1989.
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totale des moyens employés pour diviser le travail entre tâches distinctes et pour
ensuite assurer la coordination nécessaire entre ces tâches ».
Figure 4.7 Les éléments de base de l’organisation.
Source adaptée d’un schéma de HEC Montréal, tiré de H. Mintzberg
37
Cet ensemble ‘’baigne‘’ dans une idéologie que H. Minzberg (1986) définit
comme «un système riche développé et profondément enraciné de valeurs et de
croyances qui distingue une organisation particulière de toutes les autres». Ceci
renvoie à la notion de culture d’entreprise abordée précédemment.
Ce qui nous intéresse ici, et qui va être déterminant dans la mise en place d’une
IE, est la compréhension de la façon dont s’opère la coordination dans
l’organisation. S’agit-il d’un ajustement mutuel par simple communication ou
encore, par supervision directe… Cette typologie des modes de coordination va
être l’outil qui nous permettra de déterminer la plus ou moins bonne adéquation
de l’organisation avec le déploiement d’un processus IE (cf. chapitre 5).
3.c Le type de structuration par les processus
En lien avec le type de structure, nous introduisons le facteur ‘’structuration par
les processus’’. En effet, l’IE dans une entreprise correspond à un processus que
37
H. Mintzberg, Le pouvoir des organisations, Editions d’Organisation, 1986.
Ligne hiérarchique
Production, fabrication,
distribution, maintenance
Management de l’organisation
Entité de planification
Support logistique
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nous avons schématisé dans les chapitres 1 et 4 (figures 1.4 et 4.1). Le plus
souvent, la question relative à la façon dont ce processus IE peut/doit interagir
avec les autres processus de l’entreprise n’est pas abordée, car fréquemment les
approches théoriques considèrent que de facto l’IE est le processus dominant de
l’entreprise. Alors, nous tentons par une approche pragmatique de répondre à
cette question : le processus IE peut-il devenir le processus dominant et si oui,
sous quelles conditions ?
D’après H. Brandenburg et J .P. Wojtyna38
« [l]’approche processus est une
méthode d’analyse ou de modélisation. Elle consiste à décrire de façon
méthodique une organisation ou une activité dans le but d’agir dessus ». Ainsi, la
version 2000 de la norme iso9001 distingue quatre types de processus : les
processus de pilotage dont la responsabilité est à la Direction, les processus de
gestion de ressources (supports), les processus de réalisation, les processus de
mesure.
Figure 4.8 4 types de processus. Source Baze International©, Termes repris de la norme ISO 9001 ©.
1) Les processus relatifs à la responsabilité de la Direction/Management, dits de
pilotage, concernent l'activité d'élaboration des informations internes
permettant le pilotage de l'activité de l'entreprise. Parmi ce type, nous trouvons
à la fois les processus de pilotage opérationnel et de pilotage stratégique.
2) Les processus opérationnels représentent l'activité centrale de l'entreprise :
Produit, Conception, Fabrication, Vente….
38
H. Brandenburg, J .P. Wojtyna, L’approche processus – Mode d’emploi. Editions d’Organisation, 2003 seconde
édition.
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3) Les processus de gestion des ressources, dits de support, correspondent à
l'activité de mise à disposition en interne des ressources nécessaires à la
réalisation des processus opérationnels : Informatique, Achats de fournitures,
Formation, Comptabilité…
4) Les processus de mesure traitent l'efficacité des processus eux-mêmes, par
l’évaluation des écarts entre les résultats et les objectifs définis.
Les processus clés sont inclus dans la première catégorie : les processus de
pilotage et plus particulièrement les processus de pilotage stratégique. Comme le
stipule la norme AFNOR FD X 50-176, « [v]oilà des processus essentiels. Ils sont
le nerf du système. Ils participent et contribuent en effet à la détermination, à
l'élaboration de la politique et au déploiement des objectifs dans l'organisme. Ils
sont les fils conducteurs des processus opérationnels et de soutien. Ils les
pilotent, les surveillent. Ces processus intègrent la Revue de Direction, le Pilotage
de l'amélioration continue, le Management de la qualité... ». L’enjeu consiste à
faire la cartographie des processus de l’entreprise afin de déterminer quel est le
positionnement le plus efficace et réaliste du processus IE.
Dans ce chapitre, nous avons donc explicité les quatre éléments déterminants de
la mise en place d’un dispositif d’IE :
-l’intensité concurrentielle qui selon son degré va d’autant plus imposer ou pas le
besoin d’une IE ;
-la culture d’entreprise (ou encore la volonté du dirigeant dans le cadre d’une
TPE, voire PME) qui pourra être plus ou moins compatible avec une IE ;
-le type d’organisation impliquant un mode de coordination spécifique. Cette
spécificité pourra être plus ou moins antagoniste avec les fondamentaux d’une IE.
-Enfin, un quatrième élément : les processus, car il s’agit d’appréhender la façon
dont le processus IE peut se mailler avec d’autres processus préexistants.
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Chapitre 5 : Mode opératoire du modèle
________________________________________
1. Les principes d’un ‘’nouvel’’ audit IE
2. Indicateur « Intensité concurrentielle »
3. Indicateur « Culture d’entreprise »
4. Indicateur « Type d’organisation »
5. Indicateur « Processus »
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1. Les principes d’un ‘’nouvel’’ audit IE
B. Besson définit l’Intelligence Stratégique comme « la maîtrise de
l’information utile à la détection de menaces et d’opportunités de toutes
natures ». L’entreprise serait « [a]pte à transformer les informations en
connaissances exploitables, elle conduit des opérations d’influence ou de
contre influence. Elle éclaire et découvre des innovations dans tous les
secteurs de son activité. Elle assure sa protection en détectant des
menaces ».
Figure 5.1 L'organigramme de l'entreprise stratège. Source M&B Besson Sécurité Economique ©
Mais comment cette aptitude est-elle acquise ? Ou plutôt, cette aptitude est-elle
accessible à toute entreprise et organisée de manière toujours identique ?
Nous proposons un audit qui touche au cœur même de l’entreprise, avec des
indicateurs liés à chacune des variables explicatives mises en lumière, ayant pour
finalité un diagnostic et une aide à la mise en œuvre d’une IE adaptée à la
situation.
2. Indicateur « Intensité concurrentielle »
Nous proposons l’indice Herfindahl-Hirschman qui est un indice mesurant la
concentration d’un marché.
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« Il est établi en additionnant le carré des parts de marché (généralement
multipliées par 100) de toutes les entreprises du secteur considéré. Plus l'IHH
d'un secteur est fort, plus la production est concentrée.
L'IHH est utilisé en droit de la concurrence par les autorités de concurrence à
deux titres : en valeur absolue et en variation (avant et après l'opération de
concentration envisagée).
On distingue habituellement trois zones :
IHH inférieur à 1000 : secteur peu concentré, présentant peu de risques
de problèmes;
IHH compris entre 1000 et 2000, avec un delta inférieur à 150 : zone
intermédiaire, pouvant présenter des risques en présence de certains
facteurs;
IHH supérieur à 2000, avec un delta supérieur à 150 : zone de risques
importants »
(Source Wikipedia, fr.wikipedia.org/wiki/Indice_de_Herfindahl-Hirschmann).
Nous utilisons donc cet indice pour mesurer l’intensité de la concurrence :
lorsque l’IHH est inférieur à 1000, le secteur est peu concentré, signifiant a
contrario qu’il y a une forte concurrence (de nombreux acteurs et des parts de
marché réparties entre ces acteurs). Par rapport à notre propos, plus la
concurrence est intense, plus la nécessité d’un dispositif IE sera critique. A
l’inverse, on pourra comprendre qu’une Direction Générale d’une entreprise
ne soit pas favorable à un dispositif IE si le IHH est supérieur à 2000 (très peu
de concurrents et/ou des parts de marché concentrées sur très peu d’acteurs).
Pour autant nous n’affirmons pas que l’IE est superflue pour une entreprise
dans un secteur avec peu ou sans concurrence. En effet dans ce dernier cas,
l’IE peut être un moyen de veiller s’il y a émergence d’un ou de concurrents.
Néanmoins, l’absence de concurrence peut expliquer la raison pour laquelle le
besoin d’un dispositif IE n’est pas ressenti par une entreprise.
Illustration 5.1 Représentation de l’indicateur IHH.
IHH>2000
Concurrence
faible
2000>IHH<1000
Concurrence
moyenne
IHH<1000
Concurrence
forte
Favorableà la mise en place
d’un dispositif IE
IE
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De façon qualitative, une analyse des cinq forces de la concurrence devra être
effectuée en complément, car l’IE ne concerne pas uniquement les
concurrents directs, mais aussi les quatre autres forces de la concurrence
ainsi que les aspects règlementaires.
3. Indicateur « Culture d’entreprise »
Nous utilisons, pour cette partie audit de la Culture d’entreprise, l’approche de
G. Hofstede39
.
Il définit cinq facteurs de différenciation culturelle au niveau des nations, que
nous appliquons ici aux entreprises :
-La distance hiérarchique : les cultures qui ont une faible distance hiérarchique
attendent et acceptent les relations de pouvoir qui sont plus sur le mode de la
consultation et démocratiques;
-Le contrôle de l'incertitude : degré de tolérance face à l’incertitude du futur ;
-L'individualisme (versus collectivisme) : degré de liberté d'un individu par rapport
au groupe ;
-La masculinité (versus féminité) : primauté du factuel versus l’émotionnel ;
-L'orientation long terme (versus court terme).
Illustration 5.2 Représentation de l’indicateur Culture d’entreprise, adaptée de F. Bulinge40
39
G. Hofstede, Culture's Consequences: comparing values, behaviors, institutions, and organizations across
nations. Thousand Oaks, 2001, seconde édition.
40
F. Bulinge, Pour une culture de l’information dans les petites et moyennes organisations : un modèle
incrémental d’intelligence économique. Thèse de doctorat, 2002.
Facteurs Faible ----------------------------------------------> Fort
Distance
hiérarchique
X
Contrôle
incertitude
X
Individualisme X
Masculinité X
Orientation long
terme
X
X : positionnementidéal dans le cadre de la mise en place d’un dispositif IE
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Lors de la phase d’audit Culture d’entreprise, il s’agira de mesurer la proximité
avec le positionnement idéal pour la mise en place d’une IE: une faible distance
hiérarchique, un fort contrôle de l’incertitude, un groupe qui prime sur l’individu,
une primauté de l’émotionnel, une orientation long terme.
4. Indicateur « Type d’organisation »
Il n’y a pas d’organisation idéale, mais les six types d’organisation de
Mintzberg: ajustement mutuel, supervision directe, standardisation des
procédés de travail, standardisation des résultats, standardisation des
qualifications, standardisation des normes vont, dans le cadre d’une mise en
œuvre d’un dispositif IE, impliquer des modes de gouvernance IE différenciés.
Selon nous, l’ajustement mutuel, la standardisation des qualifications, la
standardisation des normes militeraient en faveur d’une IE décentralisée alors
que la supervision directe, la standardisation des procédés de travail, la
standardisation des résultats induiraient une centralisation de l’IE.
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Figure 5.2 Les mécanismes de coordination et leur identification.
Source graphique par M. Moreno (Cours IAO/IFSE), tiré de H. Mintzberg, 1989.
5. Indicateur « Processus »
Il s’agira d’opérer une cartographie des processus afin de mettre en lumière
les processus clés de l’entreprise et pour répondre à la question : le dispositif
IE doit-il être un processus clé de l’entreprise ou un processus support vis-à-
vis des processus clés ?
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Il y a notamment un processus en passe d’être un processus clé dans les
Grandes Entreprises, sous l’impulsion de la loi Sarbanes-Oxley
(fr.wikipedia.org/wiki/Loi_Sarbanes-Oxley): le processus du management des
risques.
Figure 5.3 Relations entre les 4 objectifs de l'entreprise, 8 éléments du Management des
Risques et les unités de l'organisation. Source Committee of Sponsoring Organizations of the
Treadway Commission ©, 2004.
« Le dispositif de management des risques contribue aussi à la mise en place
d’un reporting efficace et au respect de la conformité aux lois et
réglementations. Ce faisant, il protège l’image de l’entité et lui épargne les
conséquences néfastes d’une perte de réputation. En bref, grâce au
déploiement d’un tel dispositif, une société est mieux armée pour atteindre ses
objectifs et éviter les écueils et les impondérables »41
.
Les finalités du dispositif IE et du management des risques se rejoignent, c’est
un exemple d’interaction de deux processus. L'IE, dans son rapport à
l'incertitude, « fournirait ici un ensemble de techniques pour détecter des
signaux, acquérir des données fiables, mais aussi et surtout interpréter (en
fonction d’un but stratégique), sélectionner, protéger (pour conserver un «
différentiel » par rapport aux concurrents), évaluer des risques et possibilités,
faire circuler (au bon endroit, au bon moment), structurer, vérifier, produire de
la connaissance à partir de données… » (F.B. Huyghe) 42
.
41
The Committee of Sponsoring Organizations of the Treadway Commission, 2004 ©,
http://www.coso.org/documents/COSO_ERM_ExecutiveSummary_french.pdf
42
F.B. Huyghe, Définir l'intelligence économique. Rappel de quelques notions. Billet blog, 21 mars 2009.
http://www.huyghe.fr/actu_239.htm
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De son côté, le Management des Risques se nourrirait de l'IE, s'appuyant
ensuite sur ces propres outils : cartographie des risques, indicateurs et suivi
pour le déclenchement d'alertes (M.N. EL Mabrouki)43
.
Selon B. Besson, pour commencer une démarche d’intelligence économique,
il faut se poser les questions suivantes : « quels dangers courons-nous ? » ;
« quels sont nos moyens de protection ? » ; « disposons-nous des meilleurs
systèmes ? » ; « quelle est la fiabilité de nos partenariats ? ». « Une entreprise
qui protège ses membres, ses clients et ses partenaires renforce sa cohésion,
son image et augmente sa capacité d’influence. L’intelligence des risques
permet de devancer des concurrents moins avancés en la matière » (Extrait
du résumé dans la Revue Electronique Suisse de Science de l'Information du
5ème colloque franco-suisse en intelligence économique et veille stratégique
de la Haute Ecole de Gestion Arc).
B. Gilad44
concevait déjà en 2001 le Risk Management comme l'évolution de
la Competitive Intelligence que l'on assimilera à l'IE en entreprise. Il
s'interrogeait sur la survie des professionnels de la Competitive Intelligence,
développant un argument simple : les professionnels de la Competitive
Intelligence utilisent l'information concurrentielle pour identifier et manager les
risques; par concurrentielle il ne faut pas comprendre uniquement
‘’concurrents’’, mais l'ensemble de l'environnement de l'entreprise. Toujours
selon B. Gilad, le professionnel de l'IE d'entreprise devrait avoir pour finalité
l'identification et la minimisation des risques, mariant pour se faire des
méthodes IE (e.g. signaux faibles, SEWS : Strategic Early Warning System,
war game) avec des outils du Management des Risques (e.g. cartographie,
indicateurs d'alerte).
43
M.N. EL Mabrouki, L'Intelligence Economique : quels apports à la gestion des risques.
http://atlas.irit.fr/PIE/VSST/Actes%20VSST%272007%20Marrakech/24-A13-Gestion-des-
risques/El_%20Mabrouki.pdf
44
B. Gilad, Competitive Intelligence Magazine, Industry Risk Management: CI's Next Step. Competitive
Intelligence Magazine, 2001. http://www.academyci.com/ResourceCenter/CI_Next_Step.pdf
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Figure 5.4 Industry Risk Management: CI's Next Step. Source Competitive Intelligence Magazine ©,
B. Gilad
En définitive, en complément et en amont de l’organigramme de l’entreprise stratège
de B. Besson, nous proposons le schéma suivant pour signifier la nécessité d’une
analyse de l’environnement avant la mise en place d’un dispositif IE.
Illustration 5.2 les 4 déterminants d’un dispositif. Source Auteur
Dispositif
IE
Intensité
concurrentielle
Culture
d’entreprise
Type
d’organisation
Processus
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CONCLUSION
Cette thèse professionnelle est née d’une interrogation (qu’est que l’Intelligence
Economique ?) et d’un manque ressenti vis-à-vis des multiples définitions qui
s’attachaient plus répondre ‘’au quoi’’ et ‘’au qui’’, en tenant pour acquis ‘’le
comment’’ et ‘’le quand’’.
Nous avons donc tenté de répondre à ces questions ‘’ quand’’ et ‘’comment’’ en :
-éclairant d’un point de vue théorique quatre déterminants de la mise en œuvre d’un
dispositif IE au sein d’une entreprise ;
-adoptant une démarche résolument analytique, ‘’micro’’ (descendant au niveau fin
de l’entreprise) et positive au sens scientifique du terme (qui s’attache aux
explications objectives du fonctionnement d’une IE au sein d’une entreprise), en
appréhendant les facteurs d'équilibre et de déséquilibre du système IE liés à
l’intensité concurrentielle, la culture d’entreprise, le type d’organisation et l’articulation
des différents processus ;
-proposant, d’un point de vue méthodologique, des indicateurs d’évaluation
opérationnels ;
-offrant une application en grandeur nature au travers de notre expérience Renault.
Nous sommes conscients des limites de la recherche, notamment la partie
application qui n’a eu que comme champ d’application une seule entreprise. De
même, l’utilisation de l’étude Benchmarking de J. Bondu n’a pu être démonstrative,
puisqu’elle n’avait pas été structurée initialement pour le champ couvert ici. Elle nous
a néanmoins mis sur la voie des variables significatives, notamment la culture
d’entreprise.
Il s’agirait d’élargir à d’autres entreprises cette méthodologie d’audit, à partir des
variables explicatives mises à jour et leur indicateur associé, en amont de la mise en
place d’un dispositif IE ou a posteriori, pour objectiver les raisons de
dysfonctionnement ou de bon fonctionnement d’une IE.
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Résolument nous espérons avoir ouvert des perspectives, confirmant, s’il le fallait,
que l’IE était pluridisciplinaire abordant les champs de la théorie des organisations,
de la cartographie des processus et le caractère prépondérant de l’aspect humain à
travers la culture d’entreprise.
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Liste des figures
Figure 1.1 Cycle du renseignement. Source www.manager.com. © Image
Figure 1.2 Management de l’intelligence économique. Source Norme AFNOR FD X
50-052.
Figure 1.3 Intelligence Economique et Aide à la Décision. Source F. Jakobiak.
Copyright EXISTRAT©. http://www.finyear.com/Intelligence-economique-et-aide-a-la-
decision-BEIC_a74.html
Figure 1.4 Processus IE. Source Intelligence Economique. Un guide pour débutants
et praticiens ©.
http://www.madrimasd.org/queesmadrimasd/socios_europeos/descripcionproyectos/
documentos/intelligence-economique-guide-integral.pdf
Figure 2.1 Approche systémique de l’IE. Source F. Bulinge (ibid.). L’IE d’après le
méta-modèle de Schwartz.
Figures 2.2a et 2.2b Modèle de Management par l’Intelligence Economique Source
AFDIE.
Figure 3.1a Différents schémas possibles d’implantation de l’IE. Source Intelligence
Economique. Un guide pour débutants et praticiens ©.
Figure 3.1b Différents schémas possibles d’implantation de l’IE. Source Intelligence
Economique. Un guide pour débutants et praticiens ©.
Figure 3.1c Différents schémas possibles d’implantation de l’IE. Source Intelligence
Economique. Un guide pour débutants et praticiens ©.
Figure 4.1 l’IE en 4 étapes. Image source Spyworld
nblas.posterous.com/cartographie-de-lintelligence-economique
Figure 4.2 L’arbre généalogique de l’IE. Source F. Bulinge ©.
Figure 4.3 Source Modèle Mc Kinsey ©
Wikipedia, en.wikipedia.org/wiki/McKinsey_7S_Framework
Figure 4.4 Les 5 Forces de la concurrence de M. Porter +1. Source image
Actinnovation ©.
Figure 4.5 Le Pilotage du système d’intelligence économique. Source B. Besson.
Figure 4.6a Processus de gestion de la connaissance par l’IE et le KM. Source F.
Blondel http://www.cairn.info/revue-vie-et-sciences-de-l-entreprise-2007-1-page-
158.htm
Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012
Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School
Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 55
Figure 4.6b Processus de gestion de la connaissance par l’IE et le KM. Source F.
Blondel http://www.cairn.info/revue-vie-et-sciences-de-l-entreprise-2007-1-page-
158.htm
Figure 4.7 Les éléments de base de l’organisation. Source adaptée d’un schéma de
HEC Montréal, tiré de H. Mintzberg.
Figure 4.8 4 types de processus. Source Baze International©, Termes repris de la
norme ISO 9001 ©.
Figure 5.1 L'organigramme de l'entreprise stratège. Source M&B Besson Sécurité
Economique ©.
Figure 5.2 Les mécanismes de coordination et leur identification. Source graphique
par M. Moreno (Cours IAO/IFSE), tiré de H. Mintzberg, 1989.
Figure 5.3 Relations entre les 4 objectifs de l'entreprise, 8 éléments du Management
des Risques et les unités de l'organisation. Source Committee of Sponsoring
Organizations of the Treadway Commission ©, 2004.
Figure 5.4 Industry Risk Management: CI's Next Step. Source Competitive
Intelligence Magazine ©, B. Gilad.
Figure 6.1 Différentes sources contribuant à l’apparition et à l’évolution de la culture
d’entreprise. Source Culture d’entreprise ©.
Figure 6.2 Les mécanismes de coordination et leur identification. Source graphique
par M. Moreno (Cours IAO/IFSE), tiré de H. Mintzberg, 1989.
Figure 6.3 Schémas possibles d’implantation de l’IE. Source Intelligence
Economique. Un guide pour débutants et praticiens ©.
Figure 7.1 Adaptée de la figure Framework to World Class Market Intelligence dans
“World class Market Intelligence”, GIA ©.
Figure 7.2 adaptée de Industry Risk Management: CI's Next Step. Source
Competitive Intelligence Magazine ©, B. Gilad.
Figure 7.3 adaptée de Industry Risk Management: CI's Next Step. Source
Competitive Intelligence Magazine ©, B. Gilad.
"Déterminants de la mise en place d'une entité Intelligence Economique au sein d'une organisation"

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"Déterminants de la mise en place d'une entité Intelligence Economique au sein d'une organisation"

  • 1. Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances Promotion 2012 Thèse Professionnelle en Intelligence Economique et Management des Connaissances Présentée par Rodolphe Delabarre « Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une entité Intelligence Economique au sein d’une organisation » Thèse dirigée par M. Olivier Pommeret, Professeur Affilié – SKEMA
  • 2. Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012 Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 2 SKEMA BUSINESS SCHOOL RESUME « Déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une entité Intelligence Economique au sein d’une organisation » par Rodolphe Delabarre Directeur de thèse professionnelle: Olivier Pommeret La présente thèse professionnelle traite des déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’un processus d’Intelligence Economique (IE) au sein d’une organisation. Ces déterminants sont au nombre de quatre : 1) le type d’organisation (sur la base de la typologie de Mintzberg) de l’entreprise considérée impactant les flux d’informations, 2) la cartographie des processus et la façon dont le processus IE s’y intègre, 3) la culture d’entreprise favorisant ou non un partage des connaissances, et enfin 4) la pression de la concurrence, comme déterminant exogène. Ce travail de recherche se propose donc d’offrir un complément aux écrits sur l’IE en appréhendant la problématique des conditions de déploiement au sein des entreprises, adressant les questions, qui nous semblent orphelines, du ‘’quand ‘’ et du ‘’comment’’ relatifs à une mise en place d’un dispositif IE. L’approche théorique sera accompagnée d’un volet pratique traitant du déploiement d’un processus d’IE au sein de l’entreprise Renault. Pour ce faire, seront étudiés les quatre déterminants. Leur mise en perspective conduira à une préconisation et mise en application du système le plus adéquat : une organisation IE maillée, notamment avec la Direction du Management des Risques pour partager une finalité ; c’est à dire la réduction des risques via une maîtrise de l’information stratégique (A. Guilhon/Groupe de travail du Haut Responsable à l’Intelligence Economique).
  • 3. Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012 Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 3 TABLE DES MATIERES REMERCIEMENTS------------------------------------------------------------------------------------p.4 INTRODUCTION GENERALE--------------------------------------------------------------------p.5 PARTIE I : MISE EN PLACE ET FINALITE D’UNE INTELLIGENCE ECONOMIQUE AU SEIN DE l’ENTREPRISE : UN ETAT DE L’ART--------------------------------------------------------------------------------p.10 Chapitre 1 : Intelligence Economique : présentation générale, définitions-----------p.11 Chapitre 2 : Analyse critique de l’approche systémique de l’Intelligence Economique---------------------------------------------------------------------p.19 Chapitre 3 : Vers une analyse organisationnelle--------------------------------------------p.24 PARTIE II : CADRE DE LA RECHERCHE---------------------------------------------------p.29 Chapitre 4 : Analyse théorique des déterminants d’une mise en place et de la finalité de l’Intelligence Economique en entreprise------------------------------p.30 Chapitre 5 : Mode opératoire du modèle------------------------------------------------------p.40 PARTIE III : MANAGEMENT DE L’INTELLIGENCE ECONOMIQUE AU SEIN DE L’ENTREPRISE RENAULT---------------------------------------------------- Chapitre 6 : Organisation, Processus, Culture d’Entreprise et Environnement de Renault------------------------------------------------------------------- Chapitre 7 : Application du modèle d’Intelligence Economique------------------------ CONCLUSION--------------------------------------------------------------------------------------p.49 Bibliographie-----------------------------------------------------------------------------------------p.51 Liste des figures------------------------------------------------------------------------------------p.54 Liste des illustrations------------------------------------------------------------------------------p.56
  • 4. Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012 Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 4 REMERCIEMENTS L’auteur souhaite exprimer sa reconnaissance au Directeur Général Adjoint Plan- Produit-Programmes et au Directeur de la Stratégie et Plan Groupe de RENAULT pour lui avoir fait confiance et lui avoir permis de mettre en œuvre son projet IE, dont l’inscription au Mastère Spécialisé en Intelligence Economique et Management des Connaissances faisait partie. Il tient également à remercier l’ensemble du corps professoral du Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances de SKEMA BUSINESS SCHOOL. Enfin, l’auteur adresse un salut particulier à sa famille pour son soutien de tous les instants.
  • 5. Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012 Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 5 INTRODUCTION GENERALE Que sais-je de l’Intelligence Economique ? C’est de cette interrogation qu’est née une investigation des différentes définitions qui en ont été faites et une réflexion sur les déterminants d’une mise en place optimale d’une entité Intelligence Economique au sein d’une entreprise. Comment définir l'Intelligence Economique (IE) : une science; une discipline; une boîte à outils? Pourquoi ne pas l’appréhender comme une méthode? Méthode, un mot apparemment anodin, qui pourtant délivrerait tout son fondement et son sens à l'IE, car selon Descartes « on ne peut se passer d'une méthode pour se mettre en quête de la vérité des choses ». Une méthode donc pour recueillir, traiter, analyser, synthétiser l'information et enfin recommander, préconiser un plan d'actions à partir de la connaissance acquise. Alors qu'est-ce qu'est vraiment l'IE? Serait-ce une science? A l'instar de « L'économie [qui] est la science qui étudie comment des ressources rares sont employées pour la satisfaction des besoins des hommes vivant en société » (E. Malinvaud, dans « Leçons de théorie microéconomique »), selon Hervé Basset (Site web « Intelligence Scientifique et Veille » intelligencescientifique.wordpress.com) , l'IE ou Intelligence Scientifique se définirait « comme l’ensemble des actions coordonnées d’acquisition, d’analyse, de conservation et de diffusion de l’information de nature scientifique en vue de son exploitation par les acteurs de l’institution ». Pour autant cela n'en fait pas une science, car l'Intelligence Economique n'est pas : « [cet] ensemble cohérent de connaissances relatives à certaines catégories de faits, d'objets ou de phénomènes obéissant à des lois et/ou vérifiés par les méthodes expérimentales » (Larousse). La référence scientifique serait plus liée à « la science de l’information [qui] a pour objet la compréhension d’un processus d’échange relevant de la préoccupation de la récupération de l’information quelle qu'elle soit » (L. Fillipozzi à propos de « Science de l’Information : de la discipline à l’enseignement », J. Deschamps). Serait-ce une discipline, au sens « [d'] une branche du savoir développée par une communauté de spécialistes adhérant aux mêmes pratiques de recherche » (Wikipedia, fr.wikipedia.org/wiki/Discipline) ?
  • 6. Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012 Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 6 En fait, la branche du savoir concernée ici serait celle du Système d'Information (ou SI) : « [cet] ensemble organisé de ressources (matériel, logiciel, personnel, données, procédures…) permettant d'acquérir, de stocker, de communiquer des informations sous forme de données, textes, images, sons… dans des organisations pour répondre aux besoins en information de ses utilisateurs ». Ainsi, le processus d'Intelligence Economique de l'entreprise s'inscrirait dans ce Système d'Information. Serait-ce une boite à outils? On pense au récent ouvrage de Ch. Deschamps et N. Moinet, « La boîte à outils de l'Intelligence Economique »1 qui délivre cinquante neuf outils. Pour autant ces outils sont organisés selon les six dimensions de l'IE: « Intégrer et orienter une démarche d'intelligence économique, Surveiller son environnement pertinent, Traiter et analyser l'information stratégique, Manager l'information et la connaissance, Protéger son patrimoine immatériel, Influencer son environnement », sous-tendant qu'au-delà d'une simple boîte à outils, il y a bien évidemment une finalité; ce qu'O. Soula désigne « comme la manière d'utiliser l'information et la communication pour rendre une entreprise plus performante est essentielle à la vie des entreprises dans un monde économique qui s'annonce de plus en plus incertain » dans le billet blog intitulé « Qu'est-ce que l'intelligence économique ? » (20 novembre 2011, www.pensee-action.com). Une manière donc, et même une méthode. Alors l'IE, une méthode structurante pour aider les entreprises à maîtriser leur environnement et prendre des décisions stratégiques? Il y aurait donc une analogie avec « Le discours de la méthode » de Descartes, sous-titré « Pour bien conduire sa raison, et chercher la vérité dans les sciences », posant le postulat que l'homme peut accéder à la connaissance universelle par la raison. Il s'agit de : 1/ne recevoir aucune chose pour vraie tant que son esprit ne l'aura clairement et distinctement assimilé préalablement; 2/diviser chacune des difficultés afin de mieux les examiner et les résoudre; 3/établir un ordre de pensées, en commençant par les objets les plus simples jusqu'aux plus complexes et divers, et ainsi de les retenir toutes et en ordre; 4/passer toutes les choses en revue afin de ne rien omettre. Quatre règles donc (règle d'évidence, règle d'analyse, règle de synthèse, règle des 1 Ch. Deschamps et N. Moinet, La boîte à outils de l'Intelligence Economique. Dunod, 2011.
  • 7. Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012 Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 7 dénombrements entiers) qui s'appliquent aisément à l'information stratégique qu'une entreprise doit maîtriser pour survivre et/ou prospérer. En définitive, ne détient-on pas un nouveau discours de la méthode à appliquer à l'entreprise, posant comme postulat que l'entreprise peut accéder à la connaissance par l'IE ? Une alchimie, en quelque sorte, entre une méthode et de l'intuition/de l'instinct, qui fera du veilleur ou de l'analyste IE une personne clé au sein de l'entreprise. Mais au-delà du ‘’quoi’’, et du ‘’qui’’, tel le réseau d’acteurs impliqués au sein de l’entreprise, se posent les questions du ‘’comment’’ et du ‘’quand’’ il est optimal de mettre en place un système d’IE au sein d’une entreprise. On ne peut occulter les ressorts; les déterminants de la mise en place et du déploiement de l'IE au sein d'une entreprise, et comment arriver à un maillage de ces différentes activités IE. En effet, nous revisiterons les différentes définitions de l'Intelligence Economique, telles que celle du rapport Martre ou encore celle de l'association des professionnels de l'information et de la documentation (ADBS) pour faire le constat que ne sont pas abordées les questions du contexte préalable nécessaire à la mise en place de ces actions et ensuite de leur coordination. De plus, dans les termes employés par G. Colletis (de l'Association Française pour le Développement de l'Intelligence Economique, AFDIE), la notion de compétence émerge : compétence organisationnelle ? Cette compétence ne serait-elle pas inscrite dans ce que Ch. Laure et P. Jouxtel nomment l'ADN de l'entreprise dans l'article Le Cercle Les Echos du 05/06/2012, ADN : la clé cachée de la réussite stratégique? Ce que nous nommerons aussi sa culture organisationnelle. Toute entreprise ne serait ainsi pas apte à mettre en place et à déployer un système efficace d'Intelligence Economique. Ne faudrait-il pas au préalable qu'elle ait une culture adéquate, une organisation idoine? Nous entendons par culture « [ce qui] caractérise l'entreprise et la distingue des autres, dans son apparence et, surtout, dans ses façons de réagir aux situations courantes de la vie de l'entreprise comme traiter avec un marché, définir son standard d'efficacité ou traiter des problèmes de personnel 2 ». Ceci fait référence à la vision du consultant en Intelligence Economique exprimée par J. Bondu, le comparant à un médecin: « Le système immunitaire du malade existe mais il est déficient, le médecin vient seulement le 2 M. Thevenet, La culture d'entreprise. PUF, 2010.
  • 8. Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012 Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 8 renforcer. De même, après avoir établi son diagnostic, le consultant en IE vient revivifier la gestion des informations dans l’entreprise, en optimisant sa collecte, son traitement, et sa diffusion. Il n’y a pas de remède miracle. Il faut bien comprendre de quoi souffre l’entreprise pour apporter la bonne solution ». Pour autant, la cause racine pourrait être plus profonde, c'est à dire être liée à l'ADN même de l'entreprise; ADN qui serait incompatible avec la mise en place d'un système IE. Par incompatibilité, il faut comprendre une culture d'entreprise et/ou une organisation ne privilégiant pas la communication et le partage entre les acteurs, ou encore ne motivant pas les collaborateurs pour obtenir les consensus nécessaires... En effet la culture d'entreprise « entraîne aussi certains côtés négatifs, certaines limites, si elle n'est pas suffisamment prise en compte. C'est le cas d'une culture d'entreprise trop forte, qui peut mener les membres de l'organisation à une myopie envers le marché. Une "culture du succès" pourrait ainsi inhiber certains réflexes de survie et entraîner l'entreprise dans des projets dangereux pour son avenir » (Wikipedia, fr.wikipedia.org/wiki/Culture_d'entreprise). En définitive, il faudrait, avant toute chose, comprendre l'organisation sous les différents angles définis par M. Thevenet : « l'ensemble des valeurs partagées, rites, mythes, symboles et [son] histoire » dans le cadre d'une mise en place ou d'un audit d'une IE. Et de conclure que le déploiement d'une Intelligence Economique au sein d'une entreprise ne pourra pas se décréter, et ne pourra pas être ‘’du clés en main’’. Notre travail vise donc à mettre en lumière les éléments déterminants dans la mise en place d’un dispositif IE au sein d’une entreprise, éléments qui relèvent plus des sciences ‘’molles ‘’ que des sciences ‘’dures’’, car liés à l’humain : type d’organisation de l’entreprise considérée, type de procédures, type de culture d’entreprise, intensité de la concurrence à laquelle l’entreprise est confrontée ; autant de facteurs clés qui ne sont, par exemple, pas mesurés dans l’audit d’une IE (test 1000) proposé par B. Besson3 . C’est donc cette carence que nous nous proposons de combler : avant de faire l’audit de l’IE dans une entreprise, il s’agit de faire un diagnostic du contexte (facteurs endogènes et exogènes) dans lequel l’entreprise agit. Ainsi, en guise d’hypothèses de recherche, nous postulons qu’avant toute implantation d’une IE dans une entreprise, il s’agit de faire un diagnostic 3 Académie de l’Intelligence Economique, Le « Test 1000 » ©. http://www.veille.ma/IMG/pdf/test-1000- intelligence-economique-entreprise.pdf
  • 9. Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012 Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 9 environnement/type d’organisation/cartographie des processus/culture d’entreprise. Il y aurait des conditions préalables qui doivent être créées afin que le milieu soit propice. Ensuite, une fois définies ces conditions, ce que nous appellerons ‘’le quand’’, nous nous attellerons au ‘’comment’’ ; à savoir l’alternative entre une entité IE intégrée/centralisée ou une entité IE maillée/décentralisée. La méthodologie que nous utiliserons sera double. Dans un premier temps, nous réutiliserons la thèse professionnelle de J. Bondu4 dont l’objectif était de réaliser un benchmarking des approches IE des différentes grandes entreprises françaises. Nous poursuivrons donc ce travail en offrant un éclairage complémentaire : tenter d’expliquer le type d’IE mis en œuvre dans telle ou telle entreprise via une mise en perspective des quatre déterminants clés : Type d’organisation/Type de procédures/Type de culture d’entreprise/Intensité concurrentielle. Nous apporterons donc un volet explicatif à l’approche de J. Bondu. Ensuite, nous validerons nos hypothèses dans le cadre du déploiement d’une organisation IE au sein de l’entreprise Renault. Nous établirons donc un diagnostic des quatre déterminants pour cette entreprise et justifierons le type d’IE mis en œuvre (maillée vs centralisée) ainsi que son modus operandi. Il s’agira d’une expérience in vivo, puisque le fruit de dix huit mois d’activité comme directeur Intelligence Economique et Benchmarking au sein de l’entreprise Renault. Notre travail nous semble utile à double titre. D’un point de vue théorique, il complète les définitions faites de l’intelligence Economique en ce sens que nul n’a mis en lumière les conditions nécessaires à la mise en place d’une IE. De plus, notre travail est d’utilité première pour Renault, car il définit les conditions de mise en place d’une IE au sein de l’entreprise, avec notamment un maillage clé entre IE et Management des Risques ; deux directions qui ne se parlaient pas auparavant et qui travaillent désormais main dans la main, avec pour finalité d’alerter sur les risques stratégiques et de proposer des contremesures à la Direction Générale. Ce maillage IE/Management des Risques est de notre point de vue la concrétisation opérationnelle de la définition de l’IE comme « le processus de maîtrise de l’information stratégique ayant pour finalité la réduction des risques » (A. Guilhon Groupe de travail du Haut Responsable à l'Intelligence Economique). 4 J. Bondu, Benchmarking des pratiques d’intelligence économique. Thèse professionnelle, 2001.
  • 10. Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012 Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 10 PARTIE I : MISE EN PLACE ET FINALITE D’UNE INTELLIGENCE ECONOMIQUE AU SEIN D’UNE ENTREPRISE : UN ETAT DE L’ART Chapitre 1 : Intelligence Economique : présentation générale, définitions Chapitre 2 : Analyse critique de l’approche systémique de l’IE Chapitre 3 : Vers une analyse organisationnelle « La connaissance s'acquiert par l'expérience, tout le reste n'est que de l'information ». Albert Einstein
  • 11. Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012 Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 11 Chapitre 1 : Intelligence Economique ________________________________________ 1. Présentation générale - Concepts et Histoire 2. Définitions 3. Approche systémique
  • 12. Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012 Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 12 1. Présentation générale – Concepts et Histoire Qu’est-ce que l’Intelligence Economique ? Question qui peut sembler anodine, mais qui finalement prend tout son sens, lorsque l’on constate qu’il y a presque autant de définitions de l’IE que de définisseurs. Ainsi, Stéphane Goria dans une analyse de la proximité entre Knowledge Management et Intelligence Economique fait le constat que ces deux domaines souffrent « de ne pas disposer à l’heure actuelle de définition consensuelle pour les qualifier ».5 Cet auteur opère une démarche historique et présente les différentes phases constitutives et fondatrices de l’IE. Phase 1 : L’IE comme système de veille (fin des années 50 jusqu’au début des années 80). Figure 1.1 Cycle du renseignement. Source www.manager.com © Image L’IE d’origine américaine est donc ici associée à la Business Intelligence (1958) et bientôt la Competitive Intelligence (1959) que M. Porter6 va développer dans les années 80 au travers de l’analyse des cinq forces de la concurrence et qui constituera un point de départ de la phase 2. 5 S. Goria, knowledge Management et Intelligence Economique deux notions aux Passés proches et aux futurs complémentaires, http://stephane.goria.free.fr/#_Stéphane_GORIA 6 M. Porter, How Competitive Forces Shape Strategy, Harvard business Review, March/April 1979.
  • 13. Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012 Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 13 Phase 2 : la veille stratégique (années 80). L’action d’intelligence stratégique au sens de la norme AFNOR (Agence Française de NORmalisation) FD X 50-0527 est l’ « engagement d'un ensemble de démarches hiérarchisées et ordonnées permettant d'aboutir à la formulation d'analyses à haute valeur décisionnelle en vue de la prise de décision par la direction ». Figure 1.2 Management de l’intelligence économique. Source Norme AFNOR FD X 50-052 Phase 3 : l’école française de l’IE (années 1990). Ce sont donc dans les années 90, que le concept d’IE apparaît, promu par l’école française. S. Goria relate donc qu’en 1992, l’expression "intelligence économique" est utilisée pour la première fois par C. Harbulot8 faisant référence à « toutes les opérations de surveillance de 7 AFNOR Norme FD X 50-052, Management de l'intelligence stratégique, 2011. 8 Ch. Harbulot, La machine de guerre économique, Editions Economica, 1992.
  • 14. Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012 Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 14 l’environnement concurrentiel : veille, protection, manipulation de l’information (leurre, contre-information, …), influence ». C’est donc une définition dite ‘’englobante’’, pour reprendre l’idée de S. Goria. Mais à trop englober n’a-t-on pas mélangé les problématiques liées aux Etats et celles liées aux entreprises menant à un concept polymorphique et donc non spécifique ? Il y a certes des points de convergence entre Etats et Entreprises, mais cette non- spécificité n’occulte-t-elle pas les conditions de mise en place d’une démarche IE au sein d’une entreprise ? La définition de l’IE reste à un niveau macro, c'est-à-dire partant du tout pour expliquer les parties (versus micro qui elle s’intéresse aux unités de base telles que l’entreprise, prenant en compte son contexte pour expliquer son attitude).Ou dit autrement, le caractère trop transversal de l’IE (Etats-Entreprises, mais aussi au sein d’une entreprise ayant à voir avec la stratégie, le marketing, la finance, la technologie…) ne la dessert-il pas? 2. Définitions : de la Veille à l’IE Revisitons donc les différentes définitions afin d’appréhender si certaines abordent le niveau ‘’micro’’. Commençons donc par la veille. Cette dernière d’après l’AFNOR, à travers la norme expérimentale française XP X 50-0539 , est « l’activité continue et en grande partie itérative visant à une surveillance active de l’environnement technologique, commercial, etc. pour en anticiper les évolutions ». Selon P. Romagni et V. Wild10 , « la veille est une analyse des différentes facettes de l’environnement afin de développer la proactivité et de préparer au mieux la prise de décision d’une organisation ». Ces deux définitions sont à compléter, car comme le souligne T. Bouchakor11 : « Toutefois, deux conditions sont nécessaires pour mener une fonction de veille efficacement : une bonne connaissance de la culture de l’entreprise ainsi qu’une maîtrise suffisante de l’environnement dans lequel le veilleur agit. » 9 AFNOR, Norme XP X 50-053, Prestation de veille et prestation de mise en place d’un système de veille. 1998. 10 P. Romagni, V. Wild, L’intelligence économique au service de la stratégie de l’entreprise. LPM, 1998. 11 T. Bouchakor, Dispositif d’Intelligence Economique pour le secteur de l’Offshoring au Maroc Stratégie et Mise en œuvre. Thèse professionnelle, 2006.
  • 15. Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012 Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 15 De plus, la veille est insuffisante, car « [elle] consiste à observer de façon systématique, mais passive, l’environnement sous tous ses aspects (économique, juridique, culturel, social, historique, écologique…). La veille se différencie de l’intelligence économique en s’interdisant de modifier l’environnement sur lequel elle exerce une observation continuelle. La veille a un rôle de détection tandis que l’intelligence économique a une mission de positionnement stratégique de l’entreprise dans l’environnement qu’elle remplit par une stratégie d’influence et de coercition des acteurs de cet environnement12 ». Alors que recouvre l’IE ? Le rapport MARTRE13 , en donne la définition suivante : « L'intelligence économique peut être définie comme l'ensemble des actions coordonnées de recherche, de traitement et de distribution, en vue de son exploitation, de l'information utile aux acteurs économiques. Ces diverses actions sont menées légalement avec toutes les garanties de protection nécessaires à la préservation du patrimoine de l'entreprise, dans les meilleures conditions de délais et de coûts. L'information utile est celle dont ont besoin les différents niveaux de décision de l'entreprise ou de la collectivité, pour élaborer et mettre en œuvre de façon cohérente la stratégie et les tactiques nécessaires à l'atteinte des objectifs définis par l'entreprise dans le but d'améliorer sa position dans son environnement concurrentiel. Ces actions, au sein de l'entreprise, s'ordonnent autour d'un cycle ininterrompu, générateur d'une vision partagée des objectifs de l'entreprise. » Cette définition fondatrice explicite très clairement les finalités de l’IE pour une entreprise, mais pour autant ne décrit pas la façon dont les actions doivent s’ordonner. Tout comme Ph. Baumard, pour qui: « l'intelligence économique n'est plus seulement un art d'observation mais une pratique offensive et défensive de l'information. Son objet est de relier entre eux plusieurs domaines pour servir à des objectifs tactiques 12 Ph. Baumard, Stratégie et surveillance des environnements concurrentiels. Masson, 1991. 13 Œuvre collective du Commissariat du Plan, Intelligence économique et stratégie des entreprises. La Documentation Française, 1994.
  • 16. Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012 Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 16 et stratégiques de l'entreprise. Elle est un outil de connexion entre l'action et le savoir de l'entreprise ». Même constat s’agissant de la définition de B. Besson et J.C. Possin, pour lesquels « l'intelligence économique est la maîtrise concertée de l'information et de la coproduction de connaissances nouvelles. Elle est l'art de détecter les menaces et les opportunités en coordonnant le recueil, le tri, la mémorisation, la validation, l'analyse et la diffusion de l'information utile ou stratégique à ceux qui en ont besoin. Elle impliquera une protection adaptée à tous les stades de son élaboration : acquisition, traitement, exploitation, et au patrimoine en résultant avec une attention particulière aux prémisses (...). Pour l'essentiel, l'intelligence économique est un cycle d'informations dont la finalité est la production de renseignements stratégiques et tactiques à "haute valeur ajoutée" ». Cette définition s’attache au ‘’pourquoi’’ et au ‘’quoi’’, mais peu au ‘’comment’’. Idem pour C. Revelli : « l'intelligence stratégique est un processus de collecte, traitement et diffusion de l'information qui a pour objet la réduction de la part d'incertitude dans la prise de toute décision stratégique. Si à cette finalité on ajoute la volonté de mener des actions d'influence, il convient de parler alors d'intelligence économique.» En somme, chacune de ces définitions vient étoffer le champ et les finalités de l’IE, mais n’explicite pas les conditions de mise en place au sein d’une entreprise. De son côté, pour l’association des professionnels de l’information et de la documentation (ADBS), « [l]’intelligence économique est constituée par l'ensemble des concepts, des outils, des méthodologies et des pratiques permettant de mettre en relation, de façon pertinente, différentes connaissances et informations dans la perspective de la maîtrise et du développement de la dynamique économique. Cette mise en relation implique en particulier : - une mobilisation des hommes ; - un traitement et une analyse de l'information et de la connaissance orientés vers une finalité opérationnelle ; - une circulation efficace des informations et des connaissances au sein des organisations concernées ». Ici on effleure du doigt, la notion d’humain que nous relierons aux aspects de culture d’entreprise et de structure des organisations. Faudrait-il que des conditions préalables à la mise en place d’un dispositif IE soient réunies ?
  • 17. Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012 Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 17 Des capacités spécifiques donc, auxquelles G. Colletis, l’un des trois pères fondateurs de l'Association Française pour le Développement de l'Intelligence Economique (AFDIE), fait référence, l'IE représentant la « capacité [d'une entreprise] à combiner efficacement les réseaux et compétences extérieures en vue de résoudre un problème productif inédit ». 3. Approche systémique de l’IE L’IE en entreprise est souvent présentée en tant que système. L’approche systémique au sens de D. Beriot14 « conduit à appréhender de manière globale, et non analytique, un système et son environnement; utiliser un langage commun pour travailler entre plusieurs disciplines ou plusieurs métiers; choisir une stratégie optimale pour agir sur les points sensibles d’un système ». Figure 1.3 Intelligence Economique et Aide à la Décision. Source F. Jakobiak. Copyright EXISTRAT©. http://www.finyear.com/Intelligence-economique-et-aide-a-la-decision-BEIC_a74.html Si nous interprétons le schéma de F. Jakobiak15 , la « finalité » du système serait donc l’aide à la décision : décisions offensives, défensives et organisationnelles ; les niveaux d'organisation seraient les observateurs, les capteurs d’informations, le 14 D. Beriot, Manager par l’approche systémique. Editions d’Organisation, 2006. 15 F. Jakobiak, L’intelligence économique, la comprendre, l’implanter, l’utiliser. Editions d’Organisation, 2004.
  • 18. Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012 Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 18 groupe d’experts et la Direction Générale ; et enfin, les échanges entre les parties correspondraient aux flux d’informations. F. Jakobiak souligne un facteur clé de succès ; à savoir l’implication et le soutien du Président Directeur Général vis-à-vis de la démarche IE. Ceci est-il véritablement suffisant ? En effet, l’approche devrait appréhender les facteurs d'équilibre et de déséquilibre du système IE et pour ce faire, une démarche analytique doit être entreprise ou encore une approche micro, comme évoquée précédemment. L’IE en entreprise ne peut être résumée à un simple processus tel que ci-dessous, car il nie ou ne tient pas compte du contexte, ce que nous avons appelé des déterminants endogènes à l’entreprise (type d’organisation, processus, culture d’entreprise) et un déterminant exogène : l’intensité de la pression concurrentielle à laquelle l’entreprise en question est exposée. Figure 1.4 Processus IE. Source Intelligence Economique. Un guide pour débutants et praticiens. © http://www.madrimasd.org/queesmadrimasd/socios_europeos/ descripcionproyectos/documentos/intelligence-economique-guide-integral.pdf
  • 19. Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012 Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 19 Chapitre 2 : Analyse critique de l’approche systémique de l’IE ________________________________________ 1. Un concept d’IE non mature 2. L’épreuve des faits : de premières hypothèses
  • 20. Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012 Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 20 1. Un concept d’IE immature F. Bulinge16 constate que « le concept [d’IE] est encore immature et non validé d’un point de vue scientifique. Il est en effet confus au plan théorique (définitions floues et parfois divergentes, confusion fréquente entre la veille et l’IE) et il est intuitif au plan opérationnel (les actions entreprises dans les diverses régions ne reposent sur aucune base scientifique) ». Il milite donc en faveur d’une approche systémique. F. Bulinge reprend ainsi la définition de J. de Rosnay17 pour décrire un système comme un « ensemble d’éléments en interaction dynamique organisés en fonction d’un but. ». L’approche systémique de F. Bulinge est complète (versus le système de F. Jakobiak présenté précédemment) en ce sens qu’elle appréhende trois plans : le plan individuel, le plan logique, le plan synergique. De ces trois plans et de leurs interactions vont naître, de notre point de vue, les facteurs d’équilibre et de déséquilibre du système IE. Figure 2.1 Approche systémique de l’IE. Source F. Bulinge (ibid.). L’IE d’après le méta-modèle de Schwartz 18 Selon F. Bulinge, « cette approche théorique permet par exemple d’expliquer en quoi la diffusion de l’IE s’est avérée inefficiente. En effet, on ne peut envisager une appropriation durable de méthodes et d’outils (plan individuel), sans prendre en 16 F. Bulinge, L’intelligence économique comme instrument de développement autonome dans les PMO. Proposition d’un modèle de transfert. http://bulinge.univ-tln.fr/Franck_Bulinge/Articles/IE_PMO.pdf 17 J. de Rosnay, Le macroscope. Le Seuil, 1975. 18 E. Schwartz, A meta model to interpret the emergence, evolution and functioning of viable natural systems, Cybernetics and Systems. World Scientific. 1994.
  • 21. Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012 Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 21 compte les dimensions logiques (dynamique de groupes) et synergiques (état d’esprit adapté) ». Mais, si les trois plans sont exposés, il n’y a pas pour autant d’analyse approfondie des tenants et aboutissants : quelles sont les conditions de réussite ou les risques liés à chaque plan, quels sont les blocages possibles dans le passage d’un plan à l’autre ? Le cahier des charges d’une mise en place d’une IE au sein d’une entreprise ou encore l’audit d’une IE déjà existante devrait donc passer par une analyse détaillée de ces trois niveaux. Nous pouvons adresser la même critique au modèle de l’Association Française pour le Développement de l'Intelligence Economique (AFDIE) qui présente onze facteurs clés liés au management par l’Intelligence Economique. Concernant le leadership, une des recommandations est de faire partager une culture de l’information. La problématique est qu’une culture de l’information ne se décrète pas. Donc, avant d’établir une IE dans une entreprise, il s’agirait de comprendre quels sont les freins liés notamment au partage de l’information, en décryptant en particulier quelle est la culture de l’entreprise concernée. Figures 2.2a et 2.2b Modèle de Management par l’Intelligence Economique Source AFDIE 19 19 J.P. Mousnier, Un modèle de management par l’IE, pour quoi faire ? d’après Benchmark européen de pratiques en IE, dir. P.Larrat. L’Harmattan, 2008.
  • 22. Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012 Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 22 2. L’épreuve des faits : de premières hypothèses L’analyse de J. Bondu20 opérée lors de sa thèse professionnelle consistant en un Benchmarking des pratiques d’Intelligence Economique, nous est apparue intéressante pour tenter de mettre en lumière un lien de cause à effet entre l’organisation et la culture des entreprises et la façon dont est structurée l’entité Veille/IE de l’entreprise en question. J. Bondu, au vu des vingt quatre entreprises faisant partie de son panel, tire deux constats majeurs. Le premier est lié à l’organisation et au phénomène de rétention d’information : « Certaines entreprises ont dit avoir eu des difficultés à coordonner les structures de veille pour des raisons de rivalités entre les entités de veille. Etre à la tête d'une structure de veille permet d'être alimenté en information. Or si une coordination se met en place, il y a un risque de perdre cette prérogative. C'est sans doute en connaissance de ces difficultés que des entreprises, qui tentent de mettre en place une coordination, accordent beaucoup d'importance à l'aspect relationnel et humain, pour ne pas soulever de réticences». Le second est lié au facteur humain : « S'il est un point qui fait l’unanimité entre tous mes interlocuteurs, c’est bien la place du facteur humain dans la veille. Que ce soit au niveau de la détection des besoins, de la collecte, du traitement ou de la diffusion des informations…, la qualité du travail effectué est fortement fonction de la qualité humaine des veilleurs ». De plus, parmi les critères de catégorisation, au-delà de la définition des besoins, de la collecte des informations, de la diffusion des informations, du traitement des informations, de l’intégration de la veille au processus de création des produits, était pris en compte l’aspect centralisée ou décentralisée de la veille. C’est à ce dernier critère que nous nous sommes intéressés, tentant de trouver un lien entre organisation de l’entreprise et centralisation ou non de l’entité veille/IE. 20 J. Bondu, (ibid.)
  • 23. Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012 Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 23 Ainsi, parmi les vingt quatre entreprises interviewées, onze avaient une entité veille/IE centralisée versus décentralisée pour treize d’entre-elles. Nous avons tenté de voir s’il y avait des invariants pour expliquer le pourquoi de la décentralisation. Nous ne dégageons que quelques hypothèses de travail à ce stade, car le Benchmarking effectué n’avait pas cette finalité. Il semble ainsi que la structure matricielle soit un facteur à la décentralisation, de même qu’une culture d’entreprise orientée tradition orale et/ou fondée sur le réseau. Bien évidemment, ceci n’a pas de valeur scientifique. Il s’agit d’aller plus loin dans l’investigation.
  • 24. Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012 Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 24 Chapitre 3 : Vers une analyse organisationnelle ________________________________________ 1. De la théorie à la réalité des entreprises 2. L’organisation comme variable clé
  • 25. Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012 Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 25 1. De la théorie à la réalité des entreprises F. Peguiron21 dans sa thèse de doctorat soutient que « [l’]intelligence économique et concurrentielle s’appréhende conséquemment comme un prolongement, non comme un substitut ou un dépassement du management de l’entreprise. L’intelligence économique implique l’action. Pour cette raison, un tel dispositif ne peut se réduire à une cellule dite d’intelligence économique : il se doit d’innerver l’organisation entière et de mobiliser un périmètre d’individus bien plus large que celui des acteurs spécialisés officiellement impliqués dans l’activité de veille ». De même, citant H. Wilensky22 , il est affirmé qu’ « [i]l est essentiel alors de conjuguer les techniques d’intelligence économique avec le pilotage stratégique et les processus décisionnels ». Ceci peut être pertinent d’un point de vue théorique. Mais, cela reste du domaine de ‘‘l’incantatoire’’, car c’est nier les réalités diverses des différentes entreprises. Le principe de réalité impose de mettre la théorie à l’épreuve. Ce principe de réalité avait été abordé (mais pas développé) par le groupe du rapport Martre23 . Ainsi, un sous-groupe intitulé "Analyse comparée des systèmes d'intelligence économique" a mis en exergue des variables « permettant d'expliquer la présence d'activités d'intelligence économique au sein d'entreprises dans le monde entier ». Parmi ces variables, nous trouvons : -l’exposition aux marchés mondiaux impliquant une contrainte « à une compréhension globale de leur environnement » ; -la nouveauté d’un marché ; -des horizons technologiques longs. 21 F. Peguiron, Application de l'Intelligence Economique dans un Système d’Information Stratégique universitaire: les apports de la modélisation des acteurs. Thèse de Doctorat Université Nancy 2. 2006. 22 H. Wilenski, Organizational Intelligence : Knowledge and Policy in Government and Industry. Basic Book, 1967. 23 Œuvre collective du Commissariat du Plan, Intelligence économique et stratégie des entreprises. (Ibid.).
  • 26. Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012 Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 26 De même, F. Dufour24 , pour expliquer le processus IE, fait référence à la typologie en six groupes des modes de traitement de l’information de Ph. Baumard25 . Cette typologie est fondée sur deux variables : le degré de contrôle de l‘industrie sur son environnement et le degré de disponibilité de l‘information. « - Les discrétionnaires : peu d‘informations et environnement historiquement contrôlé (ex. : les cafetiers – excès de complication du SI par manque d‘informations utiles à l‘interprétation) ; - Les monopoleurs : environnement contrôlé et densité de l‘information analysable (ex. : l‘aéronautique – traitement efficace de l‘information) ; - Les improvisateurs : environnement historiquement turbulent et peu d‘informations (ex. : les céréaliers – excès de complication du SI par manque d‘informations utiles à l‘interprétation) ; - Les équilibristes : environnement turbulent mais maîtrise des SI pour obtenir une information synchrone avec les mouvements du marché (ex. : la grande distribution – traitement efficace de l‘information) ; - Les metteurs en scène : industrie naissante et peu d‘informations analysables (ex. : les start-ups – traitement efficace mais en phase de test); - Les chefs d‘orchestres : industrie naissante mais véritable maîtrise de l‘information qui leur permet de façonner le développement de leur industrie (ex. : les prescripteurs, les gourous, les produits dérivés, les softwares – excès de simplification du SI grâce à la maîtrise de l‘information utile à l‘interprétation) ». Nous considérons que la variable relative au degré de concurrence est pertinente, mais elle n’est pas l’unique à prendre en compte. 2. L’organisation comme variable clé Au-delà des variables explicatives de l’existence d’une IE au sein des entreprises, il est essentiel de définir les conditions de mise en place d’une IE et de sa réussite. Dans ce cadre, la compréhension de l’organisation des entreprises est fondamentale, car une mise en place d’une IE ne se fait pas ex nihilo, elle s’intègre à une organisation et un management préexistant. Il s’agit donc d’en faire le diagnostic 24 F. Dufour, Approche dynamique de l'intelligence économique en entreprise : apports d'un modèle psychologique des compétences: contribution à l‘élaboration de programmes d‘actions de la CCI de Rennes. Thèse de Doctorat, Université européenne de Bretagne, 2010. 25 Ph. Baumard, Organisations déconcertées : la gestion stratégique de la connaissance. Masson, 1996.
  • 27. Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012 Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 27 ou, comme stipulé dans « Intelligence économique le guide pour débutants et praticiens26 », « d’adapter l’intelligence économique aux systèmes organisationnels. […] En fait, l’Intelligence économique ne peut pas être mise en place sans engendrer certains changements de procédure et de structure. De nouveaux rôles, de nouvelles tâches et de nouvelles relations de travail devront donc être inventés. Chaque personne impliquée par le projet devra avoir une vision claire de : qui fait quoi, qui doit travailler avec qui… ». Il faut donc comprendre, comme nous l’introduisions dans le chapitre précédent, le contexte, l’environnement ou encore ce que pourrions appeler le ‘’liquide amniotique’’ dans lequel le secteur IE va se déployer. Ce liquide va effectivement en conditionner le développement. « Le diagnostic organisationnel va donc s’employer à analyser deux grands aspects de l’entreprise : • le cadre stratégique (la loi, les aspects politiques et économiques de l’environnement de travail) et fonctionnel (planification, comparaison des résultats par rapport aux efforts, distribution des rôles et tâches) ; • le contexte collectif (climat de l’entreprise, motivation, niveaux variés de communication, styles de direction, capacité à résoudre les problèmes, organisation du pouvoir) et individuel (partenariats de pairs à pairs et partenariats entre les différents niveaux hiérarchiques) ». Ces aspects vont impacter le mode d’animation de l’IE dans l’entreprise, auquel il faut ajouter la culture d’entreprise. Ce sont donc des déterminants à la fois exogènes et endogènes à l’entreprise qui vont structurer la mise en place de l’IE ou, s’ils ne sont pas pris en compte, vont expliquer son échec. Figure 3.1a Différents schémas possibles d’implantation de l’IE. Source Intelligence Economique. Un guide pour débutants et praticiens. © 26 Partenariat entre les membres du programme CETISME, Intelligence économique. Un guide pour débutants et praticiens, 2002.
  • 28. Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012 Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 28 Figure 3.1b Différents schémas possibles d’implantation de l’IE. Source Intelligence Economique. Un guide pour débutants et praticiens. © Figure 3.1c Différents schémas possibles d’implantation de l’IE. Source Intelligence Economique. Un guide pour débutants et praticiens. ©
  • 29. Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012 Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 29 PARTIE II : CADRE DE LA RECHERCHE Chapitre 4 : Analyse théorique des déterminants d’une mise en place et de la finalité de l’Intelligence Economique en entreprise Chapitre 5 : Présentation de l’approche méthodologique « Le chercheur doit être libre de tenter des expériences audacieuses, de soutenir des théories révolutionnaires, voire paradoxales. Il doit disposer du droit à l'erreur ». Pierre Joliot
  • 30. Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012 Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 30 Chapitre 4 : Analyse théorique des déterminants d’une mise en place et de la finalité de l’Intelligence Economique en entreprise ________________________________________ 1. Contexte 2. Un déterminant exogène : la pression concurrentielle 3. Trois déterminants endogènes : la culture d’entreprise, le type d’organisation, le type de structuration par les processus
  • 31. Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012 Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 31 1. Contexte La genèse de notre questionnement est intervenue lors de la lecture des différents écrits théoriques concernant l’IE ou encore l’ensemble de ses définitions. En effet, il s’en dégage le constat qu’il n’y a qu’une seule vérité, une vérité que j’appellerais ‘’pseudo-scientifique’’ : l’existence d’une IE au sein d’une entreprise est incontournable et son modèle de déploiement serait unique. Ainsi, prenons l’exemple du guide pratique pour les PME du MEDEF 27 où nous trouvons dans le thème 2, intitulé « Créer son propre système d’intelligence économique », l’affirmation marquée : « L’intelligence économique est à la portée de n’importe quelle entreprise dans n’importe quel secteur d’activité. » Cette affirmation est des plus péremptoires, car les recommandations pour ce faire concernent notamment : -la comptabilisation des dépenses déjà engagées dans les activités qui s’apparentent à de l’IE ; -l’évaluation des coûts du savoir et non-savoir ; -la cartographie des flux informationnels au sein de l’entreprise… De plus, il faut « nommer un délégué général à l’intelligence économique qui à temps plein ou partiel organisera, réorganisera et coordonnera les différentes veilles de l’entreprise en fonction de ses projets ». L’approche est donc normative à l’instar de l’économie normative qui « fournit des prescriptions ou recommandations fondées sur des jugements de valeur personnels » (Wikipedia, fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89conomie_positive_et_normative). Figure 4.1 l’IE en 4 étapes. Image source Spyworld nblas.posterous.com/cartographie-de-lintelligence-economique 27 Le Cercle d’Intelligence Economique du MEDEF Paris, L’intelligence économique. Guide pratique pour les PME. Rapport 2006 du CIE MEDEF.
  • 32. Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012 Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 32 N’aurions-nous affaire qu’à un processus simple en quatre étapes : Recherche et Récupération de l’information, puis Extraction/ Tri, ensuite Analyse et Exploitation et enfin Restitution et Diffusion? Nous ne le pensons pas. Il nous semble plus adéquat d’adopter une démarche dite “positive”, qui s’attache aux explications objectives du fonctionnement d’une IE au sein d’une entreprise. Si nous continuons notre parallèle avec l’économie, ceci consiste à offrir un socle pour prévoir comment une démarche d’IE réagira en fonction de déterminants contextuels et structurels de l’entreprise. En effet, nous pensons que les définitions et recommandations de déploiement de l’IE font appel à une « connaissance [qui] ne porterait pas sur le monde réel, mais sur un monde idéal, où les objets sont parfaits – le monde des Idées ».28 Nous préférons résolument une approche réaliste prônée par Aristote (versus l’approche idéaliste de Platon). F. Bulinge29 réalise l’arbre généalogique de l’IE afin de montrer les sources nombreuses du concept. Nous en retenons qui ont un statut spécifique, non pas seulement en tant qu’origines mais en tant que variables d’impact dans la façon dont une IE peut se déployer : le type d’organisation/le type de structuration par les processus/la culture d’entreprise. Figure 4.2 L’arbre généalogique de l’IE. Source F. Bulinge © 28 H. Hagège, La démarche scientifique : invariants et spécificités disciplinaires. LIRDEF – Université MontpellierII – IREM, 2007. http://www.irem.univ-montp2.fr/IMG/pdf/La_demarche_scientifique.pdf 29 F. Bulinge, Pour une culture de l’information dans les PMO, un modèle incrémental d’intelligence économique. Thèse de doctorat en sciences de l’information et de la communication, 2002.
  • 33. Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012 Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 33 C'est en ce sens, qu'A. Poncier30 suggère d'utiliser le modèle 7S © de Mc Kinsey pour évaluer la performance d'une l'IE; modèle dont la grille d'analyse est fondée sur sept éléments interdépendants : la structure de l'organisation, sa stratégie, ses systèmes (processus), les valeurs partagées, les savoir-faire, les ressources humaines, le style de management ; les quatre derniers éléments dits soft ou culturels (valeurs partagées, savoir-faire, ressources humaines, style de management) détermineront toute sa spécificité. Nous retrouvons les éléments liés à la structure et les systèmes, de même qu’à la culture d’entreprise, avec un élément complémentaire lié à la stratégie que nous aborderons sous l’angle de la pression concurrentielle. Figure 4.3 Source Modèle Mc Kinsey © (Wikipedia, en.wikipedia.org/wiki/McKinsey_7S_Framework) 2. Un déterminant exogène : la pression concurrentielle Selon Alain Juillet, « [l]’intelligence économique est un mode de gouvernance dont l’objet est la maîtrise de l’information stratégique et qui a pour finalité la compétitivité et la sécurité de l’économie et des entreprises ». Par essence même, l’IE est un moyen de se prémunir contre la menace de la concurrence. Donc, la mise en place d’une IE répond à un besoin de connaître, maîtriser les 30 A. Poncier, Utiliser le modèle 7S de McKinsey en intelligence économique. 2008. http://poncier.org/blog/?p=376
  • 34. Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012 Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 34 différentes forces extérieures qui influent sur l’entreprise et ce pour mieux pouvoir anticiper et entamer une pro-activité et permettre la prise de décision. Figure 4.4 Les 5 Forces de la concurrence de M. Porter31 +1.Source image Actinnovation © Donc, l’intensité de la concurrence va être un des déterminants du déploiement plus ou moins efficient de l’IE au sein de l’entreprise. Sans concurrence effective ou sans concurrence perçue par l’entreprise, certaines des finalités de l’IE telles que listées par B. Besson32 sont caduques, notamment les deux premières : « •Accroître la compétitivité en s’adaptant aux règles de la concurrence. •Accroître la compétitivité en modifiant les règles de la concurrence. •Détecter les opportunités et écarter les menaces. •Décider à bon escient, réagir vite. » 3. Trois déterminants endogènes : la culture d’entreprise, le type d’organisation, le type de structuration par les processus 3.a La culture d’entreprise B. Besson n’évoque pas véritablement la notion de culture d’entreprise, mais il aborde néanmoins la nécessité de faire coïncider deux types de culture antagonistes pour un bon pilotage de l’IE. 31 Porter M., How Competitive Forces Shape Strategy, Harvard business Review, March/April 1979 32 B. Besson, Intelligence économique et organisations. 2ème pôle OCDIE, http://www.intelligence- economique.gouv.fr/IMG/pdf/ocdie_2.pdf
  • 35. Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012 Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 35 Figure 4.5 Le Pilotage du système d’intelligence économique. Source B. Besson (ibid.) Mais en amont du pilotage de l’IE, la culture d’entreprise va être décisive dans la possibilité de la mettre en place. Il est question ici de compatibilité. Mais qu’est-ce que la culture d’entreprise et en quoi peut-elle constituer un frein à la mise en place d’une IE ? Selon Ch. Durand, J.F. Fili, A. Hénault, « La culture d’entreprise peut être définie comme l’ensemble des éléments particuliers qui expliquent les bases du fonctionnement d’une entité spécifique. Elle est, dans un certain sens, un sous- produit de la culture nationale et par conséquent un ensemble de valeurs, de mythes, de rites, de tabous et de signes partagés par la majorité des salariés. La culture d’entreprise est une variable essentielle pour expliquer le vécu quotidien et les choix stratégiques réalisés par un groupe social »33 . Ainsi, Pascal Jouxtel rappelle qu' « avant tout tournant stratégique, il est important d'identifier quels sont les mythes fondateurs, les codes, les obligations et les interdits en vigueur dans l'organisation. Cela évite que nombre de stratégies de rupture ne tournent en longs déchirements ou, pire, en échecs » (LesEchos 24/04/2012, Pour préparer le changement, essayer l'introspection). La mise en place d’une IE au sein d’une entreprise peut être assimilée à une stratégie de rupture, car impliquant une ouverture sur l’extérieur et un management interne des flux/partages informationnels. « Lorsque [la culture d’entreprise] sous-tend des relations de pouvoirs déterminées, et que l’adaptation aux circonstances (économiques, stratégiques, technologiques…) implique la remise en cause du statut supérieur de certains groupes, la culture d’une organisation peut constituer un frein sérieux à sa capacité d’intégrer ces changements »34 (N. Lemaître-Rozencweig). 33 Ch. Durand, J.F. Fili, A. Hénault, Culture d’entreprise.2000. http://culture.entreprise.free.fr/,. 34 N. Lemaître-Rozencweig, Organisations, Stratégies, Décisions. Thèse de Doctorat, 1981.
  • 36. Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012 Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 36 Alors la culture d’entreprise représente-elle ce support permettant de tendre vers « l’entreprise cognitive »35 (B. Guilhon et J.L. Levet) dans laquelle l’IE et le Management des Connaissances constitueraient les bases de l’intelligence organisationnelle ? Figure 4.6a Processus de gestion de la connaissance par l’IE et le KM. Source F. Blondel, S. Edouard, M. N. El Mabrouki (2006) Figure 4.6b Processus de gestion de la connaissance par l’IE et le KM. Source F. Blondel, S. Edouard, M. N. El Mabrouki (2006) Du coup, une seconde question apparaît : l’organisation elle-même supporte-elle la mise en place d’une IE ? Ou encore, y a-t-il de la place pour un processus de la connaissance dès lors que l’entreprise est déjà structurée autour de processus préexistants? 3.b La structure organisationnelle L’organisation selon H. Mintzberg36 est « une action collective à la poursuite de la réalisation d’une mission commune ». Si nous considérons que l’implantation d’une IE au sein d’une entreprise représente une mission commune, il faut donc s’intéresser de près aux conditions de cette action collective, c'est-à-dire s’intéresser au type d’organisation, à sa structure ; à savoir « […] la somme 35 B. Guilhon et J.L. Levet, L’intelligence économique et l’économie de la connaissance : quelques éléments de réflexion. Economica, 2003. 36 H. Mintzberg, Le management, voyage au centre des organisations. Editions d’Organisation, 1989.
  • 37. Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012 Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 37 totale des moyens employés pour diviser le travail entre tâches distinctes et pour ensuite assurer la coordination nécessaire entre ces tâches ». Figure 4.7 Les éléments de base de l’organisation. Source adaptée d’un schéma de HEC Montréal, tiré de H. Mintzberg 37 Cet ensemble ‘’baigne‘’ dans une idéologie que H. Minzberg (1986) définit comme «un système riche développé et profondément enraciné de valeurs et de croyances qui distingue une organisation particulière de toutes les autres». Ceci renvoie à la notion de culture d’entreprise abordée précédemment. Ce qui nous intéresse ici, et qui va être déterminant dans la mise en place d’une IE, est la compréhension de la façon dont s’opère la coordination dans l’organisation. S’agit-il d’un ajustement mutuel par simple communication ou encore, par supervision directe… Cette typologie des modes de coordination va être l’outil qui nous permettra de déterminer la plus ou moins bonne adéquation de l’organisation avec le déploiement d’un processus IE (cf. chapitre 5). 3.c Le type de structuration par les processus En lien avec le type de structure, nous introduisons le facteur ‘’structuration par les processus’’. En effet, l’IE dans une entreprise correspond à un processus que 37 H. Mintzberg, Le pouvoir des organisations, Editions d’Organisation, 1986. Ligne hiérarchique Production, fabrication, distribution, maintenance Management de l’organisation Entité de planification Support logistique
  • 38. Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012 Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 38 nous avons schématisé dans les chapitres 1 et 4 (figures 1.4 et 4.1). Le plus souvent, la question relative à la façon dont ce processus IE peut/doit interagir avec les autres processus de l’entreprise n’est pas abordée, car fréquemment les approches théoriques considèrent que de facto l’IE est le processus dominant de l’entreprise. Alors, nous tentons par une approche pragmatique de répondre à cette question : le processus IE peut-il devenir le processus dominant et si oui, sous quelles conditions ? D’après H. Brandenburg et J .P. Wojtyna38 « [l]’approche processus est une méthode d’analyse ou de modélisation. Elle consiste à décrire de façon méthodique une organisation ou une activité dans le but d’agir dessus ». Ainsi, la version 2000 de la norme iso9001 distingue quatre types de processus : les processus de pilotage dont la responsabilité est à la Direction, les processus de gestion de ressources (supports), les processus de réalisation, les processus de mesure. Figure 4.8 4 types de processus. Source Baze International©, Termes repris de la norme ISO 9001 ©. 1) Les processus relatifs à la responsabilité de la Direction/Management, dits de pilotage, concernent l'activité d'élaboration des informations internes permettant le pilotage de l'activité de l'entreprise. Parmi ce type, nous trouvons à la fois les processus de pilotage opérationnel et de pilotage stratégique. 2) Les processus opérationnels représentent l'activité centrale de l'entreprise : Produit, Conception, Fabrication, Vente…. 38 H. Brandenburg, J .P. Wojtyna, L’approche processus – Mode d’emploi. Editions d’Organisation, 2003 seconde édition.
  • 39. Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012 Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 39 3) Les processus de gestion des ressources, dits de support, correspondent à l'activité de mise à disposition en interne des ressources nécessaires à la réalisation des processus opérationnels : Informatique, Achats de fournitures, Formation, Comptabilité… 4) Les processus de mesure traitent l'efficacité des processus eux-mêmes, par l’évaluation des écarts entre les résultats et les objectifs définis. Les processus clés sont inclus dans la première catégorie : les processus de pilotage et plus particulièrement les processus de pilotage stratégique. Comme le stipule la norme AFNOR FD X 50-176, « [v]oilà des processus essentiels. Ils sont le nerf du système. Ils participent et contribuent en effet à la détermination, à l'élaboration de la politique et au déploiement des objectifs dans l'organisme. Ils sont les fils conducteurs des processus opérationnels et de soutien. Ils les pilotent, les surveillent. Ces processus intègrent la Revue de Direction, le Pilotage de l'amélioration continue, le Management de la qualité... ». L’enjeu consiste à faire la cartographie des processus de l’entreprise afin de déterminer quel est le positionnement le plus efficace et réaliste du processus IE. Dans ce chapitre, nous avons donc explicité les quatre éléments déterminants de la mise en place d’un dispositif d’IE : -l’intensité concurrentielle qui selon son degré va d’autant plus imposer ou pas le besoin d’une IE ; -la culture d’entreprise (ou encore la volonté du dirigeant dans le cadre d’une TPE, voire PME) qui pourra être plus ou moins compatible avec une IE ; -le type d’organisation impliquant un mode de coordination spécifique. Cette spécificité pourra être plus ou moins antagoniste avec les fondamentaux d’une IE. -Enfin, un quatrième élément : les processus, car il s’agit d’appréhender la façon dont le processus IE peut se mailler avec d’autres processus préexistants.
  • 40. Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012 Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 40 Chapitre 5 : Mode opératoire du modèle ________________________________________ 1. Les principes d’un ‘’nouvel’’ audit IE 2. Indicateur « Intensité concurrentielle » 3. Indicateur « Culture d’entreprise » 4. Indicateur « Type d’organisation » 5. Indicateur « Processus »
  • 41. Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012 Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 41 1. Les principes d’un ‘’nouvel’’ audit IE B. Besson définit l’Intelligence Stratégique comme « la maîtrise de l’information utile à la détection de menaces et d’opportunités de toutes natures ». L’entreprise serait « [a]pte à transformer les informations en connaissances exploitables, elle conduit des opérations d’influence ou de contre influence. Elle éclaire et découvre des innovations dans tous les secteurs de son activité. Elle assure sa protection en détectant des menaces ». Figure 5.1 L'organigramme de l'entreprise stratège. Source M&B Besson Sécurité Economique © Mais comment cette aptitude est-elle acquise ? Ou plutôt, cette aptitude est-elle accessible à toute entreprise et organisée de manière toujours identique ? Nous proposons un audit qui touche au cœur même de l’entreprise, avec des indicateurs liés à chacune des variables explicatives mises en lumière, ayant pour finalité un diagnostic et une aide à la mise en œuvre d’une IE adaptée à la situation. 2. Indicateur « Intensité concurrentielle » Nous proposons l’indice Herfindahl-Hirschman qui est un indice mesurant la concentration d’un marché.
  • 42. Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012 Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 42 « Il est établi en additionnant le carré des parts de marché (généralement multipliées par 100) de toutes les entreprises du secteur considéré. Plus l'IHH d'un secteur est fort, plus la production est concentrée. L'IHH est utilisé en droit de la concurrence par les autorités de concurrence à deux titres : en valeur absolue et en variation (avant et après l'opération de concentration envisagée). On distingue habituellement trois zones : IHH inférieur à 1000 : secteur peu concentré, présentant peu de risques de problèmes; IHH compris entre 1000 et 2000, avec un delta inférieur à 150 : zone intermédiaire, pouvant présenter des risques en présence de certains facteurs; IHH supérieur à 2000, avec un delta supérieur à 150 : zone de risques importants » (Source Wikipedia, fr.wikipedia.org/wiki/Indice_de_Herfindahl-Hirschmann). Nous utilisons donc cet indice pour mesurer l’intensité de la concurrence : lorsque l’IHH est inférieur à 1000, le secteur est peu concentré, signifiant a contrario qu’il y a une forte concurrence (de nombreux acteurs et des parts de marché réparties entre ces acteurs). Par rapport à notre propos, plus la concurrence est intense, plus la nécessité d’un dispositif IE sera critique. A l’inverse, on pourra comprendre qu’une Direction Générale d’une entreprise ne soit pas favorable à un dispositif IE si le IHH est supérieur à 2000 (très peu de concurrents et/ou des parts de marché concentrées sur très peu d’acteurs). Pour autant nous n’affirmons pas que l’IE est superflue pour une entreprise dans un secteur avec peu ou sans concurrence. En effet dans ce dernier cas, l’IE peut être un moyen de veiller s’il y a émergence d’un ou de concurrents. Néanmoins, l’absence de concurrence peut expliquer la raison pour laquelle le besoin d’un dispositif IE n’est pas ressenti par une entreprise. Illustration 5.1 Représentation de l’indicateur IHH. IHH>2000 Concurrence faible 2000>IHH<1000 Concurrence moyenne IHH<1000 Concurrence forte Favorableà la mise en place d’un dispositif IE IE
  • 43. Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012 Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 43 De façon qualitative, une analyse des cinq forces de la concurrence devra être effectuée en complément, car l’IE ne concerne pas uniquement les concurrents directs, mais aussi les quatre autres forces de la concurrence ainsi que les aspects règlementaires. 3. Indicateur « Culture d’entreprise » Nous utilisons, pour cette partie audit de la Culture d’entreprise, l’approche de G. Hofstede39 . Il définit cinq facteurs de différenciation culturelle au niveau des nations, que nous appliquons ici aux entreprises : -La distance hiérarchique : les cultures qui ont une faible distance hiérarchique attendent et acceptent les relations de pouvoir qui sont plus sur le mode de la consultation et démocratiques; -Le contrôle de l'incertitude : degré de tolérance face à l’incertitude du futur ; -L'individualisme (versus collectivisme) : degré de liberté d'un individu par rapport au groupe ; -La masculinité (versus féminité) : primauté du factuel versus l’émotionnel ; -L'orientation long terme (versus court terme). Illustration 5.2 Représentation de l’indicateur Culture d’entreprise, adaptée de F. Bulinge40 39 G. Hofstede, Culture's Consequences: comparing values, behaviors, institutions, and organizations across nations. Thousand Oaks, 2001, seconde édition. 40 F. Bulinge, Pour une culture de l’information dans les petites et moyennes organisations : un modèle incrémental d’intelligence économique. Thèse de doctorat, 2002. Facteurs Faible ----------------------------------------------> Fort Distance hiérarchique X Contrôle incertitude X Individualisme X Masculinité X Orientation long terme X X : positionnementidéal dans le cadre de la mise en place d’un dispositif IE
  • 44. Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012 Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 44 Lors de la phase d’audit Culture d’entreprise, il s’agira de mesurer la proximité avec le positionnement idéal pour la mise en place d’une IE: une faible distance hiérarchique, un fort contrôle de l’incertitude, un groupe qui prime sur l’individu, une primauté de l’émotionnel, une orientation long terme. 4. Indicateur « Type d’organisation » Il n’y a pas d’organisation idéale, mais les six types d’organisation de Mintzberg: ajustement mutuel, supervision directe, standardisation des procédés de travail, standardisation des résultats, standardisation des qualifications, standardisation des normes vont, dans le cadre d’une mise en œuvre d’un dispositif IE, impliquer des modes de gouvernance IE différenciés. Selon nous, l’ajustement mutuel, la standardisation des qualifications, la standardisation des normes militeraient en faveur d’une IE décentralisée alors que la supervision directe, la standardisation des procédés de travail, la standardisation des résultats induiraient une centralisation de l’IE.
  • 45. Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012 Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 45 Figure 5.2 Les mécanismes de coordination et leur identification. Source graphique par M. Moreno (Cours IAO/IFSE), tiré de H. Mintzberg, 1989. 5. Indicateur « Processus » Il s’agira d’opérer une cartographie des processus afin de mettre en lumière les processus clés de l’entreprise et pour répondre à la question : le dispositif IE doit-il être un processus clé de l’entreprise ou un processus support vis-à- vis des processus clés ?
  • 46. Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012 Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 46 Il y a notamment un processus en passe d’être un processus clé dans les Grandes Entreprises, sous l’impulsion de la loi Sarbanes-Oxley (fr.wikipedia.org/wiki/Loi_Sarbanes-Oxley): le processus du management des risques. Figure 5.3 Relations entre les 4 objectifs de l'entreprise, 8 éléments du Management des Risques et les unités de l'organisation. Source Committee of Sponsoring Organizations of the Treadway Commission ©, 2004. « Le dispositif de management des risques contribue aussi à la mise en place d’un reporting efficace et au respect de la conformité aux lois et réglementations. Ce faisant, il protège l’image de l’entité et lui épargne les conséquences néfastes d’une perte de réputation. En bref, grâce au déploiement d’un tel dispositif, une société est mieux armée pour atteindre ses objectifs et éviter les écueils et les impondérables »41 . Les finalités du dispositif IE et du management des risques se rejoignent, c’est un exemple d’interaction de deux processus. L'IE, dans son rapport à l'incertitude, « fournirait ici un ensemble de techniques pour détecter des signaux, acquérir des données fiables, mais aussi et surtout interpréter (en fonction d’un but stratégique), sélectionner, protéger (pour conserver un « différentiel » par rapport aux concurrents), évaluer des risques et possibilités, faire circuler (au bon endroit, au bon moment), structurer, vérifier, produire de la connaissance à partir de données… » (F.B. Huyghe) 42 . 41 The Committee of Sponsoring Organizations of the Treadway Commission, 2004 ©, http://www.coso.org/documents/COSO_ERM_ExecutiveSummary_french.pdf 42 F.B. Huyghe, Définir l'intelligence économique. Rappel de quelques notions. Billet blog, 21 mars 2009. http://www.huyghe.fr/actu_239.htm
  • 47. Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012 Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 47 De son côté, le Management des Risques se nourrirait de l'IE, s'appuyant ensuite sur ces propres outils : cartographie des risques, indicateurs et suivi pour le déclenchement d'alertes (M.N. EL Mabrouki)43 . Selon B. Besson, pour commencer une démarche d’intelligence économique, il faut se poser les questions suivantes : « quels dangers courons-nous ? » ; « quels sont nos moyens de protection ? » ; « disposons-nous des meilleurs systèmes ? » ; « quelle est la fiabilité de nos partenariats ? ». « Une entreprise qui protège ses membres, ses clients et ses partenaires renforce sa cohésion, son image et augmente sa capacité d’influence. L’intelligence des risques permet de devancer des concurrents moins avancés en la matière » (Extrait du résumé dans la Revue Electronique Suisse de Science de l'Information du 5ème colloque franco-suisse en intelligence économique et veille stratégique de la Haute Ecole de Gestion Arc). B. Gilad44 concevait déjà en 2001 le Risk Management comme l'évolution de la Competitive Intelligence que l'on assimilera à l'IE en entreprise. Il s'interrogeait sur la survie des professionnels de la Competitive Intelligence, développant un argument simple : les professionnels de la Competitive Intelligence utilisent l'information concurrentielle pour identifier et manager les risques; par concurrentielle il ne faut pas comprendre uniquement ‘’concurrents’’, mais l'ensemble de l'environnement de l'entreprise. Toujours selon B. Gilad, le professionnel de l'IE d'entreprise devrait avoir pour finalité l'identification et la minimisation des risques, mariant pour se faire des méthodes IE (e.g. signaux faibles, SEWS : Strategic Early Warning System, war game) avec des outils du Management des Risques (e.g. cartographie, indicateurs d'alerte). 43 M.N. EL Mabrouki, L'Intelligence Economique : quels apports à la gestion des risques. http://atlas.irit.fr/PIE/VSST/Actes%20VSST%272007%20Marrakech/24-A13-Gestion-des- risques/El_%20Mabrouki.pdf 44 B. Gilad, Competitive Intelligence Magazine, Industry Risk Management: CI's Next Step. Competitive Intelligence Magazine, 2001. http://www.academyci.com/ResourceCenter/CI_Next_Step.pdf
  • 48. Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012 Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 48 Figure 5.4 Industry Risk Management: CI's Next Step. Source Competitive Intelligence Magazine ©, B. Gilad En définitive, en complément et en amont de l’organigramme de l’entreprise stratège de B. Besson, nous proposons le schéma suivant pour signifier la nécessité d’une analyse de l’environnement avant la mise en place d’un dispositif IE. Illustration 5.2 les 4 déterminants d’un dispositif. Source Auteur Dispositif IE Intensité concurrentielle Culture d’entreprise Type d’organisation Processus
  • 49. Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012 Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 49 CONCLUSION Cette thèse professionnelle est née d’une interrogation (qu’est que l’Intelligence Economique ?) et d’un manque ressenti vis-à-vis des multiples définitions qui s’attachaient plus répondre ‘’au quoi’’ et ‘’au qui’’, en tenant pour acquis ‘’le comment’’ et ‘’le quand’’. Nous avons donc tenté de répondre à ces questions ‘’ quand’’ et ‘’comment’’ en : -éclairant d’un point de vue théorique quatre déterminants de la mise en œuvre d’un dispositif IE au sein d’une entreprise ; -adoptant une démarche résolument analytique, ‘’micro’’ (descendant au niveau fin de l’entreprise) et positive au sens scientifique du terme (qui s’attache aux explications objectives du fonctionnement d’une IE au sein d’une entreprise), en appréhendant les facteurs d'équilibre et de déséquilibre du système IE liés à l’intensité concurrentielle, la culture d’entreprise, le type d’organisation et l’articulation des différents processus ; -proposant, d’un point de vue méthodologique, des indicateurs d’évaluation opérationnels ; -offrant une application en grandeur nature au travers de notre expérience Renault. Nous sommes conscients des limites de la recherche, notamment la partie application qui n’a eu que comme champ d’application une seule entreprise. De même, l’utilisation de l’étude Benchmarking de J. Bondu n’a pu être démonstrative, puisqu’elle n’avait pas été structurée initialement pour le champ couvert ici. Elle nous a néanmoins mis sur la voie des variables significatives, notamment la culture d’entreprise. Il s’agirait d’élargir à d’autres entreprises cette méthodologie d’audit, à partir des variables explicatives mises à jour et leur indicateur associé, en amont de la mise en place d’un dispositif IE ou a posteriori, pour objectiver les raisons de dysfonctionnement ou de bon fonctionnement d’une IE.
  • 50. Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012 Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 50 Résolument nous espérons avoir ouvert des perspectives, confirmant, s’il le fallait, que l’IE était pluridisciplinaire abordant les champs de la théorie des organisations, de la cartographie des processus et le caractère prépondérant de l’aspect humain à travers la culture d’entreprise.
  • 51. Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012 Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 51 Bibliographie  Académie de l'Intelligence Economique, Le " Test 1000 " ©. http://www.veille.ma/IMG/pdf/test-1000-intelligence-economique-entreprise.pdf  AFNOR Norme FD X 50-052, Management de l'intelligence stratégique, 2011.  AFNOR Norme XP X 50-053, Prestation de veille et prestation de mise en place d'un système de veille. 1998.  Baumard Ph., Organisations déconcertées : la gestion stratégique de la connaissance. Masson, 1996.  Baumard Ph., Stratégie et surveillance des environnements concurrentiels. Masson, 1991.  Beriot D., Manager par l'approche systémique. Editions d'Organisation, 2006.  Besson B., Intelligence économique et organisations. 2ème pôle OCDIE, http://www.intelligence-economique.gouv.fr/IMG/pdf/ocdie_2.pdf  Blondel F., Edouard S., El Mabrouki M.N., Quelle articulation entre intelligence économique et knowledge management au sein de l'entreprise ?. XVème Conférence Internationale de Management Stratégique, Annecy / Genève 13-16 Juin 2006.  Bondu J., Benchmarking des pratiques d'intelligence économique. Thèse professionnelle, 2001.  Bouchakor T., Dispositif d'Intelligence Economique pour le secteur de l'Offshoring au Maroc . Stratégie et Mise en œuvre. Thèse professionnelle, 2006.  Brandenburg H., Wojtyna J .P., L'approche processus - Mode d'emploi. Editions d'Organisation, 2003 seconde édition.  Bulinge F., Pour une culture de l'information dans les PMO, un modèle incrémental d'intelligence économique. Thèse de doctorat en sciences de l'information et de la communication, 2002.  Bulinge F., L'intelligence économique comme instrument de développement autonome dans les PMO. Proposition F. d'un modèle de transfert. http://bulinge.univ-tln.fr/Franck_Bulinge/Articles/IE_PMO.pdf  Conseil régional de Lorraine en partenariat avec les membres du programme européen CETISME, Intelligence économique. Un guide pour débutants et praticiens, 2002.
  • 52. Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012 Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 52  Deschamps Ch. et Moinet N., La boîte à outils de l'Intelligence Economique. Dunod, 2011.  Devillard O. et Rey D., Culture d'entreprise : un actif stratégique. Dunod, 2008.  Dufour F., Approche dynamique de l'intelligence économique en entreprise : apports d'un modèle psychologique des compétences: contribution à l'élaboration de programmes d'actions de la CCI de Rennes. Thèse de doctorat, Université européenne de Bretagne, 2010.  Durand Ch., Fili J.F., A. Hénault, Culture d'entreprise. http://culture.entreprise.free.fr/  El Mabrouki M.N., L'Intelligence Economique : quels apports à la gestion des risques. http://atlas.irit.fr/PIE/VSST/Actes%20VSST%272007%20Marrakech/24- A13-Gestion-des-risques/El_%20Mabrouki.pdf  Gilad B., Competitive Intelligence Magazine, Industry Risk Management: CI's Next Step. Competitive Intelligence Magazine, 2001. http://www.academyci.com/ResourceCenter/CI_Next_Step.pdf  Global Intelligence Alliance, World Class Market Intelligence - From Firefighters to Futurists, Global Intelligence Alliance White Paper 2/2009, http://www.globalintelligence.com  Goria S., knowledge Management et Intelligence Economique deux notions aux Passés proches et aux futurs complémentaires, http://stephane.goria.free.fr/#_Stéphane_GORIA  Guilhon B. et Levet J.L., L'intelligence économique et l'économie de la connaissance: quelques éléments de réflexion. Economica, 2003.  Groupe Renault, Rapport annuel 2011.  Hagège H., La démarche scientifique : invariants et spécificités disciplinaires. LIRDEF - Université Montpellier II - IREM, 2007. http://www.irem.univ- montp2.fr/IMG/pdf/La_demarche_scientifique.pdf  Harbulot Ch., La machine de guerre économique, Editions Economica, 1992.  F.B. Huyghe, Définir l'intelligence économique. Rappel de quelques notions. Billet blog, 21 mars 2009. http://www.huyghe.fr/actu_239.htm  Hofstede G., Culture's Consequences: comparing values, behaviors, institutions, and organizations across nations. Thousand Oaks, 2001, seconde édition.  Jakobiak F., L'intelligence économique, la comprendre, l'implanter, l'utiliser.
  • 53. Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012 Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 53 Editions d'Organisation, 2004.  Le Cercle d'Intelligence Economique du MEDEF Paris, L'intelligence économique. Guide pratique pour les PME. Rapport 2006 du CIE MEDEF.  Lemaître-Rozencweig N., Organisations, Stratégies, Décisions. Thèse de Doctorat, 1981.  Martre H., Intelligence économique et stratégie des entreprises. Œuvre collective du Commissariat du Plan, Intelligence économique et stratégie des entreprises. La Documentation Française, 1994.  Mintzberg H., Le management, voyage au centre des organisations. Editions d'Organisation, 1989.  Mintzberg H., Le pouvoir des organisations, Editions d'Organisation, 1986.  Mousnier J.P., Un modèle de management par l'IE, pour quoi faire ? in Benchmark européen de pratiques en IE, dir. P.Larrat. L'Harmattan.  Peguiron F., Application de l'Intelligence Economique dans un Système d'Information Stratégique universitaire: les apports de la modélisation des acteurs. Thèse de Doctorat Université Nancy 2. 2006.  Poncier A., Utiliser le modèle 7S de McKinsey en intelligence économique. 2008 http://poncier.org/blog/?p=376  Porter M.E., How Competitive Forces Shape Strategy, Harvard business Review, March/April 1979.  Porter M.E., Competitive Strategy, Free Press, New York, 1980.  Revel C., La France. Un pays sous influences? Vuibert, 2012.  Romagni P., Wild V., L'intelligence économique au service de la stratégie de l'entreprise. LPM, 1998.  de Rosnay J., Le macroscope. Le Seuil, 1975.  Schwartz E., A meta model to interpret the emergence, evolution and functioning of viable natural systems, Cybernetics and Systems. World Scientific. 1994.  The Committee of Sponsoring Organizations of the Treadway Commission, 2004 ©. http://www.coso.org/documents/COSO_ERM_ExecutiveSummary_french.pdf  Thevenet M., La culture d'entreprise. PUF, 2010.  Wilenski H., Organizational Intelligence : Knowledge and Policy in Government and Industry. Basic Book, 1967.
  • 54. Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012 Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 54 Liste des figures Figure 1.1 Cycle du renseignement. Source www.manager.com. © Image Figure 1.2 Management de l’intelligence économique. Source Norme AFNOR FD X 50-052. Figure 1.3 Intelligence Economique et Aide à la Décision. Source F. Jakobiak. Copyright EXISTRAT©. http://www.finyear.com/Intelligence-economique-et-aide-a-la- decision-BEIC_a74.html Figure 1.4 Processus IE. Source Intelligence Economique. Un guide pour débutants et praticiens ©. http://www.madrimasd.org/queesmadrimasd/socios_europeos/descripcionproyectos/ documentos/intelligence-economique-guide-integral.pdf Figure 2.1 Approche systémique de l’IE. Source F. Bulinge (ibid.). L’IE d’après le méta-modèle de Schwartz. Figures 2.2a et 2.2b Modèle de Management par l’Intelligence Economique Source AFDIE. Figure 3.1a Différents schémas possibles d’implantation de l’IE. Source Intelligence Economique. Un guide pour débutants et praticiens ©. Figure 3.1b Différents schémas possibles d’implantation de l’IE. Source Intelligence Economique. Un guide pour débutants et praticiens ©. Figure 3.1c Différents schémas possibles d’implantation de l’IE. Source Intelligence Economique. Un guide pour débutants et praticiens ©. Figure 4.1 l’IE en 4 étapes. Image source Spyworld nblas.posterous.com/cartographie-de-lintelligence-economique Figure 4.2 L’arbre généalogique de l’IE. Source F. Bulinge ©. Figure 4.3 Source Modèle Mc Kinsey © Wikipedia, en.wikipedia.org/wiki/McKinsey_7S_Framework Figure 4.4 Les 5 Forces de la concurrence de M. Porter +1. Source image Actinnovation ©. Figure 4.5 Le Pilotage du système d’intelligence économique. Source B. Besson. Figure 4.6a Processus de gestion de la connaissance par l’IE et le KM. Source F. Blondel http://www.cairn.info/revue-vie-et-sciences-de-l-entreprise-2007-1-page- 158.htm
  • 55. Thèse professionnelle Rodolphe Delabarre - Promotion 2012 Mastère Spécialisé Intelligence Economique et Management des Connaissances – SKEMA Business School Les déterminants endogènes et exogènes de la mise en place d’une IE au sein d’une organisation Page 55 Figure 4.6b Processus de gestion de la connaissance par l’IE et le KM. Source F. Blondel http://www.cairn.info/revue-vie-et-sciences-de-l-entreprise-2007-1-page- 158.htm Figure 4.7 Les éléments de base de l’organisation. Source adaptée d’un schéma de HEC Montréal, tiré de H. Mintzberg. Figure 4.8 4 types de processus. Source Baze International©, Termes repris de la norme ISO 9001 ©. Figure 5.1 L'organigramme de l'entreprise stratège. Source M&B Besson Sécurité Economique ©. Figure 5.2 Les mécanismes de coordination et leur identification. Source graphique par M. Moreno (Cours IAO/IFSE), tiré de H. Mintzberg, 1989. Figure 5.3 Relations entre les 4 objectifs de l'entreprise, 8 éléments du Management des Risques et les unités de l'organisation. Source Committee of Sponsoring Organizations of the Treadway Commission ©, 2004. Figure 5.4 Industry Risk Management: CI's Next Step. Source Competitive Intelligence Magazine ©, B. Gilad. Figure 6.1 Différentes sources contribuant à l’apparition et à l’évolution de la culture d’entreprise. Source Culture d’entreprise ©. Figure 6.2 Les mécanismes de coordination et leur identification. Source graphique par M. Moreno (Cours IAO/IFSE), tiré de H. Mintzberg, 1989. Figure 6.3 Schémas possibles d’implantation de l’IE. Source Intelligence Economique. Un guide pour débutants et praticiens ©. Figure 7.1 Adaptée de la figure Framework to World Class Market Intelligence dans “World class Market Intelligence”, GIA ©. Figure 7.2 adaptée de Industry Risk Management: CI's Next Step. Source Competitive Intelligence Magazine ©, B. Gilad. Figure 7.3 adaptée de Industry Risk Management: CI's Next Step. Source Competitive Intelligence Magazine ©, B. Gilad.